Des grands détaillants américains passent outre l’accord sur la sécurité des usines au Bangladesh

 

Dans le cadre d’un nouvel accord sur la sécurité, des détaillants figurant parmi les leaders du secteur de l’habillement à niveau mondial se sont engagés à garantir l’accès des inspecteurs du travail aux usines de leurs fournisseurs au Bangladesh.

Cependant, un groupement d’opposition intégré par plusieurs grands détaillants des États-Unis a passé outre l’accord et annoncé la formation d’un groupe de travail séparé.

L’Accord pour la sécurité incendie et bâtiment au Bangladesh, juridiquement contraignant, né à l’initiative d’une coalition d’organisations syndicales, vise à améliorer les normes de sécurité dans l’industrie de l’habillement du pays suite à l’effondrement de l’immeuble industriel Rana Plaza en avril.

L’accord a déjà été souscrit par plus de 70 entreprises qui, ce faisant, se sont engagées à contrôler par des inspections les normes de sécurité incendie et bâtiment dans les fabriques où elles se fournissent.

Les signataires, parmi lesquels se trouvent plusieurs grandes enseignes comme Inditex (Zara), Carrefour et H&M, se sont aussi engagés à prendre en charge tous frais de mise à niveau éventuels dans le cas où les immeubles industriels présenteraient des failles en matière de sécurité.

« Cet accord historique, juridiquement contraignant, sera porteur de changements tangibles sur le terrain et contribuera à la sécurité et la durabilité de l’industrie de l’habillement au Bangladesh », a indiqué Jyrki Raina, secrétaire général d’IndustriALL, qui a joué un rôle clé dans l’aboutissement de l’accord.

« Un changement fondamental n’est possible que grâce à une coalition forte entre les syndicats, les grandes enseignes et les détaillants internationaux, le gouvernement et les employeurs bangladeshis, outre la participation des travailleurs sur les lieux de travail moyennant garantie de la liberté syndicale.

Cependant, un groupement de puissants détaillants étasuniens avec, à leur tête, Walmart, se sont montrés réticents à souscrire tout accord légalement contraignant, préférant à la place s’en tenir à des accords volontaires.

Aussi ont-ils choisi d’unir leurs forces avec les anciens sénateurs George Mitchell et Olympia Snowe pour former l’Alliance for Bangladesh Worker Safety (alliance pour la sécurité des travailleurs au Bangladesh).

Alors que certains détails pratiques restent à définir, l’Alliance annoncera néanmoins ses propres propositions pour l’amélioration de la sécurité des travailleurs.

 

Rana Plaza

Cet accord résulte d’une initiative d’organisations européennes en réaction à l’effondrement de l’immeuble Rana Plaza, le 24 avril, où 1129 personnes ont trouvé la mort. Avant la tragédie, des fissures avaient été constatées dans les parois de cet édifice de huit étages.

Si l’effondrement du Rana Plaza peut être décrit comme la pire catastrophe industrielle à être survenue depuis le drame de Bhopal en 1984, il n’en demeure pas moins que d’innombrables travailleuses et travailleurs de l’habillement au Bangladesh ont perdu la vie en travaillant dans des structures mal construites, érigées à peu de frais, à la hâte et souvent sans permis.

À Savar, ville où s’est produite la tragédie du Rana Plaza, 64 travailleurs avaient déjà trouvé la mort en 2005, lorsque l’immeuble qui abritait la fabrique de vêtements Spectrum s’était écroulé.

En novembre 2012, au moins 117 travailleurs ont péri dans l’incendie de l’usine Tazreen, à Dacca.

À ce jour, pas un seul propriétaire d’usine n’a été poursuivi en justice pour les morts survenues dans des fabriques de vêtements.

 

Suspensions

L’industrie de l’habillement du Bangladesh – deuxième à niveau mondial après la Chine – est assaillie par des problèmes de santé et de sécurité, des salaires de faim et le non respect des droits des travailleurs.

Depuis avril, une série de mesures ont été mises en œuvre pour venir à bout des problèmes les plus pressants de cette industrie.

Le mois passé, les États-Unis ont suspendu les préférences commerciales accordées au Bangladesh suite à des inquiétudes liées aux conditions de travail dangereuses et aux droits des travailleurs.

Sous l’effet de la pression internationale, le gouvernement du Bangladesh procédera à une révision des amendements proposés au projet de code du travail national.

Lundi, le gouvernement bangladais a donné son accord à une initiative conjointe de l’UE et de l’OIT - le Pacte sur la durabilité – qui vise à améliorer la protection des droits des travailleurs et la sécurité dans les usines.

Le gouvernement s’y engage à respecter les droits syndicaux et à augmenter le nombre d’inspecteurs du travail de 25 pour cent (portant leur nombre total à 800) d’ici la fin de l’année.

Il est aussi prévu que le Bangladesh adopte prochainement une nouvelle législation pour faciliter la création de syndicats dans les fabriques de vêtements et indemniser les travailleuses et travailleurs victimes d’accidents.

Le Commissaire européen au commerce, Karel de Gucht a, toutefois, averti le Bangladesh que les préférences commerciales qui lui sont actuellement attribuées sous forme d’exportations en franchise de droits de douane et de contingents vers l’UE pourraient être compromises « en cas d’absence ou de manque de progrès pour les travailleuses et travailleurs du Bangladesh ».

« Je tiens à souligner que le Bangladesh…ne peut tenir pour acquises les préférences commerciales dont il jouit actuellement », a-t-il affirmé lors d’une conférence de presse où il a souligné que les vêtements représentent 90 pour cent des exportations de ce pays vers l’UE et approximativement 2,5 millions d’emplois.

À l’heure actuelle, 60 pour cent des exportations de vêtements en provenance du Bangladesh sont destinées à l’Europe et 40 pour cent aux États-Unis.

 

Cet article a été traduit de l'anglais.