Les travailleurs italiens en grève contre le Jobs Act de Renzi

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Deux des principales centrales syndicales d’Italie, la Confédération générale italienne du travail (CGIL) et l’Union italienne du travail (UIL) ont appelé à la grève générale, ce vendredi 12 décembre, contre la réforme de l’emploi initiée par le gouvernement de Matteo Renzi.

Au cœur du contentieux se trouve le Jobs Act, un train de réformes adopté par le Sénat le 3 décembre qui vise à une réorganisation profonde du marché du travail et facilitera l’embauche et le licenciement des travailleurs.

Les syndicats s’opposent aussi à la Loi de stabilité, une enveloppe budgétaire de 36 milliards d’euros qui prévoit l’introduction de réductions massives dans les dépenses publiques, plus particulièrement dans les secteurs de l’éducation et de la santé et excluant – selon les syndicats – les investissements nécessaires pour répondre à la crise du chômage des jeunes (43,3 % en octobre 2014).

Le Jobs Act prévoit l’introduction de mesures visant à réduire le nombre de contrats de courte durée, redéfinir la taille des entreprises, introduire des protections croissantes pour les travailleurs nouvellement embauchés en fonction de la durée de service et, la plus controversée de toutes les mesures, une révision de l’article 18 du Statut du travail (code du travail italien) qui prévoit une indemnisation pour les travailleurs licenciés sans motif.

L’agence d’information italienne Ansa a cité une déclaration de Susanna Camusso, secrétaire générale de la CGIL, où celle-ci accuse le gouvernement Renzi de « tirer son programme de la Cofindustria », qui représente les principaux patrons industriels de l’Italie.

Susanna Camusso aurait aussi déclaré : « Oui, le Statut (du travail de 1970) doit être modifié mais uniquement de sorte à étendre les droits et protections actuellement réservés aux seuls détenteurs de contrats permanents à temps complet à toutes les autres catégories de travailleurs. »

Le gouvernement Renzi soutient que les réformes vont simplifier le marché du travail national et combler le gouffre qui existe entre le petit nombre de travailleurs protégés et la masse de travailleurs non protégés, sous-employés et sans emploi.

La CGIL et l’UIL ont, toutefois, opposé le projet de loi qui, à leurs yeux, entraîne une précarisation accrue des travailleurs et manque de générer suffisamment d’emplois pour les chômeurs.

Le slogan choisi pour la grève générale, inspiré des récentes manifestations massives, est « Cosi non va » (« Ça ne va pas du tout »).

Elena Lattuada, secrétaire générale régionale de la CGIL pour la Lombardie, la région la plus riche et la plus populaire d’Italie, a confié à Equal Times : « Quelque 200.000 licenciements ont eu lieu en Italie au cours du troisième trimestre de 2014. Ce qui vient confirmer que même sans le Jobs Act, la flexibilité est déjà généralisée.

« Ce qu’il faut ce n’est pas libéraliser le marché de l’emploi mais plutôt stimuler la demande pour doper la consommation et l’emploi. »

 

Évasion fiscale

Le taux de chômage général en Italie est de 13,2% - le taux le plus élevé jamais relevé. D’autre part, l’économie italienne – la troisième plus importante de la Zone euro – s’est contractée de 9% depuis 2007.

« Stimuler l’économie à l’aide d’investissements publics et privés devrait constituer la priorité de ce gouvernement », a déclaré Elena Lattuada, « au même titre qu’une transparence accrue et une imposition plus équitable et juste pour remédier à l’évasion fiscale – le véritable fléau italien. »

Pour Danilo Margaritella, secrétaire général de l’UIL pour Milan et la Lombardie, la grève générale est un « moment important » pour les travailleurs italiens dès lors qu’elle contraint le gouvernement à « prendre en considération nos besoins et nos voix ».

Et Margaritella d’ajouter : « La grève générale montre au gouvernement que nous sommes prêts à lutter pour améliorer et revoir le Jobs Act qui, sous sa mouture actuelle, renferme un grand nombre d’éléments qui manquent de protéger les travailleurs et leurs droits ».

Malgré l’avis général selon lequel le marché du travail italien serait excessivement rigide pour les investisseurs et les employeurs, les données de l’OCDE prouvent que l’Italie affiche certains des indices de protection de l’emploi les plus faibles des pays de l’OCDE.

Les restrictions budgétaires en matière de dépenses publiques couplées à l’absence d’investissements publics et l’affaiblissement des protections du travail dans le Jobs Act et la Loi de stabilité représentent un vaste champ de bataille pour le mouvement ouvrier italien – une bataille qui promet de se poursuivre bien au-delà du 12 décembre.