Échec de la privatisation : revenons à l’alternative publique

Opinión

L’échec de la privatisation de l’eau, de l’énergie, des chemins de fer et de la santé montre que les défenseurs de la privatisation font de fausses promesses depuis des décennies.

Après bien des batailles, des élections ont été gagnées sur la promesse de laisser les services publics entre les mains du secteur public.

Dans des secteurs tels que la santé, l’éducation, l’eau, l’énergie et les transports, les citoyens soutiennent fermement la fourniture universelle des services publics.

Or, la privatisation et les partenariats public-privé (PPP) reviennent en force actuellement.

De nombreux gouvernements se tournent vers les partenariats public-privé dans l’espoir que le secteur privé financera les infrastructures et les services publics durement éprouvés par la crise financière.

Cet espoir est partagé depuis longtemps par la Banque mondiale et l’OCDE, mais il se profile aussi désormais dans les pays du G20 et dans les négociations en cours aux Nations Unies concernant les objectifs de développement durable et le financement du développement qui y est associé.

Si la privatisation obtient gain de cause, elle pourrait devenir une politique officielle des Nations Unies.

Pourquoi la privatisation ressurgit-elle alors qu’elle présente des défauts fondamentaux depuis trente ans ?

Notre rapport, Partenariats public-privé (PPP) : Les raisons de leur inefficacité, démystifie le processus des PPP qui s’opère pour l’essentiel dans le plus grand secret, en se cachant derrière des négociations confidentielles pour protéger des avantages commerciaux.

Dans le contexte de la crise économique, les gouvernements subissent une pression de plus en plus forte pour trouver des solutions rapides à la difficulté que représentent la gestion des services publics et le financement des infrastructures.

Plus la crise se prolonge, plus la pression se fait sentir pour trouver des réponses, mais plus grand est le risque d’en oublier les causes profondes : la cupidité, la déréglementation et une confiance excessive à l’égard des entreprises privées.

Le danger des PPP vient en partie du mystère qui en entoure le processus, au titre de négociations confidentielles destinées à sauvegarder le secret commercial.

Le processus se caractérise par l’absence de consultations publiques, par de nombreuses fausses promesses et des contrats commerciaux incroyablement complexes, qui ont vocation à protéger les bénéfices des sociétés.

Vient s’ajouter à cela la corruption, les contrats de privatisation pouvant se révéler extrêmement intéressants.

Les PPP sont utilisés pour dissimuler l’emprunt public tout en fournissant aux entreprises privées des garanties de profit à long terme accordées par l’État.

Pour survivre, les entreprises du secteur privé doivent maximiser leurs profits. C’est radicalement incompatible avec la protection de l’environnement et la garantie de l’accès universel à des services publics de qualité.

 

De puissants lobbies

Les PPP constituent un mécanisme de financement de l’infrastructure et des services onéreux et inefficace.

Malheureusement, la plupart des responsables politiques et des hauts fonctionnaires ne lisent jamais les analyses sérieuses qui critiquent les PPP.

Les gouvernements locaux et nationaux ainsi que les Nations Unies sont fortement influencés par un puissant lobby composé des plus grands cabinets d’avocats et des plus importantes entreprises du domaine des services, de la finance et du conseil, tous résolus à engranger des bénéfices grâce aux services publics de base tels que la santé, l’eau et l’énergie.

Il est de notre devoir, en partenariat avec les mouvements sociaux, de donner l’alerte et d’exiger que nos responsables publics et nos élus agissent dans la transparence et avec responsabilité, et de créer des mécanismes nous permettant de participer systématiquement aux prises de décisions.

Ces politiques de privatisation sont liées à un nouveau cycle de négociations commerciales.

Ces négociations se trament elles aussi en secret derrière des portes fermées, sans aucune consultation publique, et sont largement influencées par les intérêts des entreprises.

Les accords commerciaux vont non seulement faciliter les PPP, mais aussi les verrouiller, rendant quasiment impossible tout retour en arrière, quels que soient les résultats.

Un autre danger réside dans les efforts déployés récemment par la Banque mondiale, le G20, l’OCDE et d’autres acteurs pour « financialiser » les PPP et ainsi accéder aux milliers de milliards de dollars retenus dans des fonds de pension, des compagnies d’assurance et d’autres investisseurs institutionnels.

Pour accéder à ces fonds, on conseille aux gouvernements de conclure de multiples PPP simultanément afin de créer un panier d’actifs pouvant être groupés et vendus à des investisseurs à long terme.

C’est exactement ce qu’ont fait les sociétés de services financiers avec les prêts hypothécaires au tournant du siècle, déclenchant ainsi la crise financière mondiale de 2008.

Nous devons revenir à l’alternative publique à la privatisation, dans laquelle les gouvernements nationaux et locaux continuent de développer l’infrastructure en utilisant les deniers publics pour investir, et les organisations du secteur public pour délivrer le service.

Avec cette solution, le secteur public gagne en flexibilité, en contrôle et en efficacité comparative – en réduisant les frais de transaction et l’incertitude liée aux contrats, et en générant des économies d’échelle – et, par ailleurs, la responsabilité démocratique accrue permet des gains d’efficacité.

L’Internationale des services publics (ISP) s’engage aux côtés des syndicats nationaux et des mouvements sociaux.

Notre travail sur les échanges commerciaux a suscité un regain d’intérêt pour cette question et donné lieu à de nombreux débats approfondis sur les négociations en cours.

Dans le secteur des services publics de distribution, notre travail a permis de redonner les services publics aux municipalités à travers le monde, plus particulièrement dans le secteur de l’eau.

Et l’alternative aux PPP que nous proposons, les partenariats public-public, axés sur la solidarité et non sur le profit, commence à produire des effets au sein de la communauté du développement.

 

Cet article a été publié initialement au The Guardian’s Public Leaders Network.

Este artículo ha sido traducido del inglés.