L’Union européenne priée d’abandonner l’austérité pour combattre la pauvreté

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Quand une coalition d’ONG annonce que l’Europe ne parviendra pas à atteindre son propre objectif de sortir 20 millions de personnes de la pauvreté d’ici 2020, cela n’émeut plus grand monde.

Mais, lorsque ce constat d’échec émane du Président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, ou du Président du Conseil de l’Union européenne, Herman Van Rompuy, on y prête déjà plus attention.

C’est exactement ce qui s’est produit lors de la troisième convention de la Plateforme contre la pauvreté et l’exclusion sociale qui s’est tenue à Bruxelles à la fin du mois de novembre.

Trois ans après le lancement de la stratégie Europe 2020 visant à rendre l’Europe plus juste et plus prospère, non seulement la pauvreté n’a pas reculé, mais la situation a en fait empiré.

Un citoyen européen sur quatre, soit 125 millions de personnes, risque de basculer dans la pauvreté, soit cinq millions de personnes de plus qu’en 2010.

S’adressant aux participants de convention, Barroso a reconnu: « La situation est aujourd’hui pire que lorsque la stratégie Europe 2020 a été adoptée en 2010 ».

Lieve Fransen, Directrice du programme Europe 2020, demande aux États Membres de jouer leur rôle dans la lutte contre la pauvreté: « Nous avons mis en place un cadre législatif pour gagner ce combat, c’est désormais aux gouvernements nationaux de le mettre en œuvre correctement en adoptant les lois appropriées ».

 

L’austérité n’est pas la réponse

Pourtant, pour Barbara Hellferich, Directrice du Réseau européen anti-pauvreté (EAPN), les États Membres ne sont pas responsables de l’échec de la lutte contre la pauvreté en Europe.

Selon elle, l’Union européenne aurait dû faire davantage: « Il faut urgemment mettre en place une stratégie de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale qui inclue des mesures en matière d’éducation et d’emploi, ainsi que des politiques macroéconomiques. Il est par ailleurs nécessaire de lui consacrer davantage de fonds », explique-t-elle.

L’une des principales victoires de la société civile lors de la convention de novembre a été la décision de tenir annuellement des audiences au Parlement européen au cours desquelles des citoyens européens qui souffrent de la pauvreté auront leur mot à dire à propos de ce que l’UE devrait faire pour y remédier.

Józef Niemiec, Secrétaire général adjoint de la Confédération Européenne des Syndicats (CES), estime pour sa part que « non seulement, les mesures d’austérité et les réductions budgétaires drastiques n’ont pas permis de combattre la crise, mais elles ont en outre empiré la situation sociale. 

« Ce sont les personnes en âge de travailler qui ont été les plus touchées: pour la tranche de la population âgée de 18 à 64 ans, la pauvreté et l’exclusion sociale ont considérablement augmenté, principalement à cause de la hausse du chômage.

« Nous demandons aux dirigeants des pays européens de changer de cap au plus vite et de respecter leurs promesses de sortir l’Europe de la crise. Il existe d’autres options que l’austérité. La CES propose Une nouvelle voie pour l’Europe, un plan pour l’investissement en vue de créer des emplois de qualité. »

 

Manifestations

Malgré les récentes annonces sur la fin de la crise et sur le début de la reprise, les Européens touchés par la crise continuent de descendre dans les rues.

Après les grandes manifestations en Grèce et en Espagne à la fin de l’année dernière, un mouvement dit des fourches (forconi) a fait son apparition en Italie, bloquant des routes et des moyens de transport dans tout le pays.

En décembre, lors du dernier sommet de l’Union européenne, des milliers de manifestants ont menacé de sérieusement perturber la réunion des dirigeants européens. Ils réclamaient moins d’austérité et plus de mesures efficaces pour sortir l’Europe de la crise.

C’est en Grèce que les conséquences des politiques européennes se sont fait le plus ressentir.

Il s’agit là du premier État Membre de l’UE à avoir subi les mesures d’austérité de la Troïka (Union européenne, Banque centrale européenne et Fonds monétaire international) et, depuis 2010, la pauvreté a augmenté de façon spectaculaire dans le pays.

Alors que certains Grecs qui n’ont pas été touchés par la crise économique dans le pays se sont tournés vers l’extrême droite, d’autres ont choisi l’art.

C’est notamment le cas de Dimitris Sofianopoulos, un directeur grec, qui a récemment réalisé un film où un chien errant tient le rôle principal, et qui illustre le combat quotidien des Athéniens.

Aujourd’hui, certains souhaitent que la Grèce, qui entame sa présidence de six mois de l’Union européenne, se servira de sa position pour attirer l’attention sur le sort de millions de citoyens européens qui espèrent que le fossé se comble entre les discours des responsables publics sur la lutte contre la pauvreté et la réalité sur le terrain.