Les droits syndicaux lentement étouffés par l’emprise des militaires sur l’économie en Égypte

Les droits syndicaux lentement étouffés par l'emprise des militaires sur l'économie en Égypte

Workers at the Delta fertilizer company on 9 December 2020 after many long weeks of protest against the factory’s closure.

(Mahmoud Hefnawy)
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Les visages marqués par l’épuisement et la tristesse, des milliers d’ouvriers de l’entreprise d’engrais Delta, poursuivent leur sit-in pour protester contre la décision prise par le gouvernorat de Dakehlya de fermer et démanteler leur usine. Depuis le 2 décembre 2020, ces ouvriers accompagnés de leurs femmes et de leurs enfants, refusent de quitter le siège de la société de peur que les forces de l’ordre ne les empêchent d’y retourner. Ils demandent au président Abdel Fattah al-Sissi d’intervenir pour obliger le ministère de la Main-d’œuvre à revenir sur la décision et sauver le gagne-pain de 2.500 familles.

Derrière eux, un grand portrait du président égyptien, sur lequel est écrit « Les ouvriers de Delta soutiennent le chef de l’État ». Car ils savent qu’ils ne doivent pas froisser le régime autoritaire, pour lequel la moindre critique à son encontre peut être considérée comme du terrorisme et mener en prison. Ils craignent de subir le même sort que les 2.300 ouvriers de l’entreprise de ciment al-Qoumia, fermée en septembre 2018. Contrairement à ces derniers, qui avaient défié le régime et se sont retrouvés à la fin à la rue, les ouvriers de Delta ménagent les dirigeants pour plaider leur cause.

Mais le gouvernement reste pour l’instant sourd à leurs demandes. Entre le 31 décembre et le 2 janvier, treize ouvriers de l’entreprise, dont trois membres du comité syndical, ont été arrêtés et déférés devant le parquet de sécurité d’État, en charge théoriquement de la lutte contre le terrorisme, mais utilisé en réalité comme outil de répression. Ils ont été accusés d’inciter à la manifestation, perturber la production et de commettre des sabotages.

Construite en 1965 dans le gouvernorat de Dakhleya, à 120 kilomètres au nord du Caire, l’entreprise publique d’engrais Talkha Fertilizer (ou Delta Company for Fertilizers and Chemical Industries), produisait jusqu’à 2014, environ 800.000 tonnes d’engrais par an. Toutefois, la société a commencé à accumuler des dettes, suite à la politique du gouvernement de libéralisation du prix du gaz et aux pannes répétées provoquant la réduction de la production à partir de 2014.

Ces dernières années, le gouvernement néglige toute proposition de moderniser l’entreprise qui se dégrade depuis 40 ans. « Cela a coûté la vie de deux ouvriers, en plus de deux blessés, [en 2014] », témoigne un ouvrier qui souhaite rester anonyme.

Jusqu’en 2017, toute la production allait au ministère de l’Agriculture qui revendait ces engrais subventionnés aux agriculteurs. La production de l’usine couvrait 35 % des besoins égyptiens, un membre du comité syndical des ouvriers de l’entreprise. « Entre 2014 et 2017, le ministre de l’Agriculture achetait moins cher notre production que le coût de la production. Cela a contribué à creuser les pertes », explique-t-il à Equal Times. Le gouvernement a ensuite permis à l’entreprise de revendre 45 % de sa production dans le marché local.

En avril 2020, une panne d’électricité a eu lieu affectant la production. Des rumeurs circulent sur la complicité de l’administration de l’entreprise dans cet incident, car elle permettrait de justifier la décision de fermeture. Depuis, la direction refuse de réparer la panne.

Le ministère utilise l’argument de la baisse du chiffre d’affaires pour fermer, mais le projet de construire un complexe de logement sur ce site situé près du Nil, montre qu’il cherche d’autres intérêts. Le 5 janvier 2021, le ministère a décidé toutefois de construire une petite usine d’engrais avec certaines machines et seulement 500 techniciens de l’entreprise d’engrais Delta. Le reste des ouvriers, seront indemnisés pour avoir perdu leur travail. Le parquet général a également libéré, le 19 janvier, 11 sur 13 ouvriers arrêtés.

Les travailleurs face aux ambitions de l’armée

Pour le gouvernement, cette fermeture ne risque pas d’affecter l’approvisionnement en engrais aux agriculteurs, puisque la production nationale a augmenté récemment grâce aux grands investissements de l’armée dans cette industrie. L’armée, qui possède une trentaine d’entreprises, a massivement investi dans tous les secteurs de l’économie depuis l’élection du maréchal al-Sissi en 2014. Du ciment au fer, du marbre aux produits alimentaires, en passant par l’électroménager, les produits chimiques et la construction de train, l’armée égyptienne étend son emprise sur une grand part de l’industrie.

Exemptées de taxes, les entreprises militaires sont aussi favorisées lors d’attribution de contrats publics et pour la réalisation de grands travaux. Si le régime justifie ses ambitions par la volonté de réaliser une autosuffisance économique, l’emprise militaire sur l’économie pose problème. En mai 2018, le Fond monétaire international (FMI) a exprimé son inquiétude face à la vaste implication de l’armée dans l’économie et ses répercussions sur les secteurs autant public et que privé.

En août 2018, l’armée a inauguré le plus grand complexe de production d’engrais au Moyen-Orient à Ain Soukhna. Composé de neuf usines, le nouveau complexe a une capacité de 1,5 million de tonnes d’engrais par an. Neuf mois plus tard, la société al-Nasser pour les produits chimiques intermédiaires, appartenant aussi à l’armée, a signé un accord avec la société allemande, ThyssenKrupp, pour la construction d’un autre complexe d’engrais de six usines.

Il semble qu’à chaque fois que l’armée égyptienne se lance dans un nouveau secteur de l’industrie, cela fait des victimes collatérales, notamment les entreprises déjà en place et leurs travailleurs.

C’est ainsi, que les grands investissements de l’armée dans le secteur du ciment ont coïncidé avec la fermeture de l’entreprise al-Qoumia et le licenciement de 2.300 ouvriers en 2018. Car lors d’achat public, le gouvernement semble mettre en priorité le rachat des produits d’entreprises liées à l’armée, car personne n’ose irriter l’uniforme kaki dans l’Égypte d’al-Sissi.

Au sud du Caire, des milliers d’ouvriers d’Egyptian Iron & Steel Co, sont en passe de perdre leur travail après la décision en janvier 2021 de fermer la société, fondée en 1954. Le gouvernement invoque les pertes de l’entreprise, mais cette fermeture intervient aussi au moment où l’armée se lance fortement dans cette industrie, avec un feu vert de la part du gouvernement. En septembre 2016, le gouvernement a accordé à l’armée deux permis sur quatre consacrées à la construction de nouvelles usines de fer. Un an plus tard, l’armée a annoncé avoir commencé la production qui, selon le général Kamel al-Wazir, président de l’autorité de l’ingénierie militaire, sera destinée à la « nouvelle capitale » que l’État construit dans le désert, à 45 kilomètres à l’est du Caire. L’armée rachète aussi des entreprises existantes, comme en 2018, avec le rachat du groupe Egyptian Steel.

L’arrivée de l’armée dans l’économie civile coûte cher aux ouvriers en Égypte. Si certains ont vu leurs usines fermer définitivement leurs portes, d’autres, qui travaillent dans ces usines sous la coupe de l’armée, se retrouvent privés de la plupart de leurs droits syndicats. Celui qui ose protester contre ses conditions de travail, risque d’être déféré devant un tribunal militaire et subir une campagne de diffamation.

En mai 2016, la police a réprimé un sit-in organisé par des ouvriers de la firme militaire al-Tersana, pour protester contre les conditions de travail. En octobre 2019, 900 ouvriers ont été licenciés et 26 autres déférés devant un tribunal militaire qui les a condamnés à un an de prison avec sursis. Selon un rapport publié en mai 2018, par l’ONG, Committee For Justice, plus de 11.000 personnes, dont des dissidents, journalistes et ouvriers ont été envoyées devant les tribunaux militaires entre juillet 2013 et décembre 2017.

L’État contrôle l’action syndicale

La volonté étatique de contrôler le monde ouvrier remonte à la fondation de l’État égyptien par Gamal Abdel Nasser. Ainsi, la Fédération générale des syndicats ouvriers (ETUF en anglais), fondée en 1957, était le seul organisme habilité à représenter les ouvriers en Égypte jusqu’à 2009. Depuis sa fondation, les gouvernements successifs ont fourni d’innombrables privilèges aux dirigeants de l’ETUF pour s’assurer de leur allégeance au pouvoir, au détriment des droits des ouvriers. « Ces dirigeants sont également nommés à des postes importants à la tête des sociétés et agences publiques ainsi qu’au parlement », dit Kamal Abou Eita, syndicaliste et fondateur du syndicat des fonctionnaires de l’administration des impôts, premier syndicat indépendant en Égypte en 2009, lors d’un entretien avec Equal Times.

Selon les spécialistes des droits syndicaux, dès son arrivée au pouvoir en 2013, le Président al-Sissi a tout fait pour restreindreles gains réalisés par le mouvement syndical en Égypte lors de la Révolution de 2011. Il n’oublie pas le rôle crucial joué par les ouvriers pour délégitimer le régime de l’ancien Raïs, Hosni Moubarak, et lancer l’étincelle conduisant à sa chute.

« Contrairement à Moubarak, qui tolérait une marge de liberté d’expression aux ouvriers afin d’exprimer leurs revendications, al-Sissi ne prend pas de risque, il adopte une politique violente visant à éliminer l’action syndicale », estime Kamal Abou Eita. Les poursuites judiciaires abusives et les détentions de journalistes et de défenseurs des droits des travailleurs, parfois accompagnées de mauvais traitements, se multiplient et sont vivement dénoncées par la communauté internationale inquiète de cette répression croissante, avec souvent beaucoup de zones d’ombre, cinq ans après la mort violente d’un doctorant italien, Giolio Regeni, qui faisaint des recherches sur les syndicats en Égypte.

Après 2011, le conseil d’administration de l’ETUF a été dissous et un autre composé de syndicalistes indépendants a été formé. Six mois après le coup d’État de juillet 2013, le nouveau régime a décidé de dissoudre ce nouveau conseil et nommer d’anciennes personnalités proches de l’État à la tête de l’ETUF.

« En 2014, une nouvelle attaque contre les libertés syndicales a commencé. Le nouveau pouvoir a une politique hostile aux ouvriers et au mouvement syndical, son discours vise à accuser les ouvriers voulant organiser des grèves et protester contre les conditions de travail, d’être partisans de l’ancien régime islamiste [des Frères musulmans], autrement dit, des ennemis de la nation », explique à Equal Times, Kamal Abbas, fondateur du centre indépendant des services syndicaux et ouvriers (CTUWS en anglais pour Center for Trade Unions and Workers Services).

Intitulé 2014, l’année de l’assassinat des libertés syndicales, le rapport du CTUWS, publié en janvier 2015, a révélé que le nouveau régime a commencé à traquer les figures syndicales indépendantes, et évincer ceux qui travaillent dans des entreprises publiques et des agences de l’État.

En 2015, le gouvernement a communiqué un document aux ministères dans lequel il demandait à ces derniers de coopérer avec l’ETUF à l’encontre des syndicats indépendants et instigateurs dans les entreprises. Simultanément, les autorités répriment les sit-in et grèves, fait licencier les organisateurs et les envoie devant la justice. « La loi appliquée par le pouvoir égyptien depuis 2003, stipule que l’organisation d’une grève nécessite l’approbation de deux tiers du syndicat issu de l’ETUF. C’est impossible parce que ce dernier adopte toujours la position de l’État », dit Kamal Abbas en ajoutant que la loi interdit aussi la protestation dans les installations économiques vitales, or l’État considère la plupart des entreprises industrielles et des institutions comme vitales.

En septembre 2020, 10 ouvriers de la société Egypt textile, à Shibin el-Kom, dans le delta du Nil, à 60 kilomètres au nord du Caire, ont été licenciés et condamnés à six mois de prison et une amende de 50.000 livres égyptiennes (LE), pour avoir appelé à un sit-in afin de protester contre la décision de l’administration concernant l’arrêt du travail et l’annulation de toutes les primes pendant la pandémie de coronavirus. Pour avoir participé au mouvement, 42 autres ont été suspendus et sont encore poursuivis pour émeute et destruction des biens publics.

« La police a recouru aux tirs à balles réelles et aux bombes lacrymogènes pour disperser les ouvriers », raconte Hassan Adel à Equal Times, un ouvrier qui a participé au sit-in et dont nous avons changé le nom. Après plus de 20 ans comme ouvrier dans la société, ce père de trois enfants, ne gagne que 2.500 LE (130 euros) de salaire et 500 LE (26 euros) de prime. Pour subvenir aux besoins de sa famille, il fait huit heures supplémentaires de travail de nuit dans un restaurant, soit une semaine de 80 heures du travail. Depuis 2015, Hassan Adel assiste au licenciement de nombreux de ses collègues ayant « des idées rebelles », au regard du gouvernement. Un responsable de la sécurité a été nommé dans l’entreprise depuis 2015, pour surveiller l’activité des ouvriers et présenter des rapports aux agences de sécurité sur les ouvriers activistes.

Si le secteur public est sous l’emprise des autorités pour entraver toute action syndicale, la situation dans le secteur privé, semble encore plus critique. Abandonnés par le gouvernement, les ouvriers sont bien souvent à la merci des hommes d’affaires. Selon les statistiques de CAPMAS, seuls 34,5 % des ouvriers du secteur privé en Égypte jouissent d’une protection sociale et 39 % d’une assurance-maladie. Par ailleurs, 70 % travaillent sans contrat dans le secteur privé, notamment dans la construction.

Entraves aux organisations syndicales

En 2017, l’État a présenté un projet de loi sur les organisations syndicales, contenant plus de restrictions sur l’action syndicale et la formation des syndicats, puisqu’il stipulait que la fondation d’un comité syndical nécessiterait l’adhésion de minimum 100 ouvriers. Ce chiffre élevé a été critiqué par les syndicats indépendants, car il prive, de fait, 70 % des ouvriers en Égypte du droit de former un comité syndical. Contrôlée par des hommes d’affaires, la commission de la Main-d’œuvre au sein du Parlement, a demandé de hausser le nombre de fondateurs d’un comité à 200 ouvriers. Un député-homme d’affaire a appelé ouvertement, à l’augmenter à 500. « On ne veut pas voir des partis politiques dans nos entreprises », a-t-il avoué en 2017, lors de la discussion du projet de loi.

Pour trouver une issue, le gouvernement et le parlement se sont mis d’accord sur le nombre de 150 ouvriers pour la fondation d’un comité syndical. Par ailleurs, la loi permet de fonder un syndicat général avec 20.000 membres, et une fédération syndicale avec 200.000 membres. La loi, approuvée en 2017, exigeait de tous les syndicats la régularisation de leur situation dans les trois mois.

Suite à cela, l’Organisation internationale du Travail (OIT) a remis l’Égypte sur la liste noire des pays qui violent les libertés des travailleurs.

Depuis 2008, l’Égypte n’a quitté cette liste que deux fois. Pour échapper à la liste noire de l’OIT, le président al-Sissi a amendé la loi en août 2019, en baissant à 50, le nombre d’ouvriers nécessaires pour la fondation d’un comité syndical. « Malgré cet amendement, ce chiffre contredit les conventions internationales, signées par l’Égypte, qui empêchent normalement les gouvernements de préciser des nombres nécessaires pour la formation des syndicats », précise Kamal Abou Eita. Parmi les autres failles de cette loi, figure le fait qu’elle exclut également les classes non-ouvrières, tels que les retraités, du droit de former des syndicats, précise M. Abou Eita.

Si la loi permet pour la première fois la fondation des comités et syndicats indépendants, le gouvernement a affiché une intransigeance vis-à-vis des comités et les syndicats en dehors de l’ETUF. « Des centaines de comités et syndicats indépendants ont vu leurs documents de régularisation refusés ou bloqués sans raison valable par le ministère de la Main-d’œuvre », a indiqué un rapport publié par le CTUWS. En revanche, le ministère a approuvé très vite la régularisation des syndicats de l’ETUF.

En mai 2019, le président de l’ETUF, Gebali al-Maraghi, a appelé ouvertement à dissoudre les syndicats indépendants, affirmant que ces derniers fonctionnent illégalement et n’aident pas les travailleurs. Nommé député au Parlement depuis 2015 et considéré comme un fervent défenseur d’al-Sissi, M. al-Maraghi a précisé qu’il n’y a pas de place dans la nouvelle loi pour les syndicats indépendants.

« L’État a adopté une loi et c’est lui qui ne le respecte pas », dit Kamal Abbas. En janvier 2019, 29 comités et syndicats ont signé une note dans laquelle ils ont appelé le ministère à respecter la loi et à accepter les documents de régularisation présentés par les associations indépendantes en bonne et due forme.

Cette intransigeance de l’État a un seul objectif : obliger les syndicats indépendants à rejoindre l’ETUF. « Malheureusement, trois syndicats généraux se sont trouvés contraints de rejoindre l’ETUF en 2018 et 2019 pour échapper à ce blocage », a indiqué M. Abass, notant « qu’un seul syndicat » et moins de 200 comités indépendants ont réussi à régulariser leur situation, depuis l’entrée en vigueur de la loi en 2018.

Suite à cette loi, l’État a organisé des élections syndicales dans l’ETUF, en mai et juin 2018. Sans pareil depuis 2006, ces élections prouvent l’emprise du régime sur les ouvriers. De nombreux candidats qui ne plaisaient pas aux autorités, ont été emprisonnés, intimidés ou ont vu leurs noms effacés des listes. « C’étaient les pires élections de l’histoire contemporaine du pays. Une mascarade faite par le gouvernement pour rétablir ses hommes à la tête des syndicats », s’insurge Kamal Abass. Dans 14 syndicats sur 27 affiliés à l’ETUF, les présidents et membres du conseil d’administration ont même été choisis sans élection, par simple acclamation. Seuls sept syndicats ont élu librement leurs présidents et leurs membres.

Dans le syndicat des ouvriers de la société Egypte Textile, trois candidats se sont présentés contre le président pro-gouvernement sortant pour le poste du président du syndicat. « La police a arrêté deux entre eux quelques heures avant les élections et le troisième, qui est proche d’un député parlementaire, a été obligé à se présenter au poste d’un membre du conseil d’administration du syndicat. Le candidat pro-gouvernement a été élu sans élection », explique Hassan Adel.

Pour M. Abou Eita, il s’agit d’une bien mauvaise période dans l’histoire du mouvement syndical en Égypte. « La politique du régime a réussi à transformer les syndicats ouvriers en marionnettes, qui n’ont de fait aucun rôle », conclut-il.

This article has been translated from French.

Note : Ce reportage a pu être réalisé grâce au financement d’"Union to Union" — une initiative des syndicats suédois, LO, TCO, Saco.