Pour des politiques commerciales européennes plus strictes en défense du bien-être animal

Pour des politiques commerciales européennes plus strictes en défense du bien-être animal

Young pig tagged in a pen.
Europeans want more animal protection. As shown by the latest Eurobarometer survey on animal welfare, more than 93 per cent agree that “imported products from outside the EU should respect the same animal welfare standards as those applied in the EU.”

(Eurogroup for Animals)

L’Union européenne (UE) est un leader mondial en matière de normalisation internationale, pas seulement dans le domaine du travail et de l’environnement, mais aussi dans celui de la protection animale. Cela mérite d’être salué, même s’il reste énormément de chemin à parcourir. Sur la scène internationale, l’UE est aussi vue par beaucoup comme le principal défenseur d’un libre-échange encadré par des règles, surtout depuis l’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis.

C’est dans ce contexte qu’une organisation paneuropéenne de défense des droits des animaux représentant 58 pays à l’intérieur et hors de l’UE a lancé, en octobre 2017, un ensemble de dispositions modèles visant à mieux répondre aux impacts adverses du commerce sur le bien-être des animaux dans le cadre des accords de libre-échange de l’UE. La mesure est d’autant plus urgente dans le contexte des négociations commerciales-clés en cours ou sur le point de démarrer avec la participation des principaux importateurs de viande.

La libéralisation des échanges, qui couvre en substance l’ensemble des échanges commerciaux où interviennent des produits d’origine animale, a un impact négatif sur le bien-être animal. La négociation de l’accès aux marchés avec des partenaires tiers conduit fatalement à l’ouverture de nos propres marchés et, par-là, à un volume croissant d’importations de produits à bas prix soumis à des normes inférieures en matière de bien-être animal que celles applicables dans les pays de l’UE. Cela a des conséquences à la fois à l’intérieur de l’Europe et au-delà.

Tout d’abord, cela entraîne une souffrance accrue pour les animaux impliqués dans les processus de production à l’étranger. Les consommateurs européens achèteront les produits à bas prix, surtout en l’absence d’un système d’étiquetage qui reflète adéquatement les conditions de bien-être animal. Ce faisant, ils vont doper la demande pour de tels produits et donc, aussi, la production dans le pays partenaire. Pour donner un exemple concret, lorsqu’on achète de la viande, on peut imaginer ce que les animaux ont enduré lors du transport et de l’abattage.

Le second problème tient à l’absence de règles du jeu égales. Alors que l’UE est dotée de réglementations strictes pour garantir que ses importations répondent à des normes suffisantes, ces règles couvrent à peine le bien-être animal.

Les produits importés ne sont pas soumis aux mêmes normes que nos propres produits, ce qui a pour effet de rendre les producteurs européens moins compétitifs. S’ensuit une pression accrue sur les autorités européennes à ne pas rehausser les normes relatives au bien-être animal en Europe, pour éviter d’alourdir le fardeau réglementaire.

Ce dilemme a déjà clairement fait surface dans le débat sur le Brexit au cours de l’été 2017, avec l’inquiétude croissante que le Royaume-Uni ne pourrait maintenir ses normes élevées en matière de bien-être animal si le pays devait réellement s’engager sur la voie du « Global Britain » annoncée par la Première ministre Theresa May.

Au niveau européen, on peut d’ores et déjà remarquer un ralentissement des mesures commerciales liées aux réglementations sur le bien-être animal.

Or les Européens souhaiteraient des protections accrues pour les animaux. Si l’on en croit la dernière enquête Eurobaromètre sur l’attitude des Européens à l’égard du bien-être animal, plus de 93 % des répondants sont d’accord que « les produits importés provenant de pays hors de l’Union européenne devraient respecter les mêmes normes de bien-être animal que celles appliquées en son sein ».

Ce n’est pas le cas à l’heure actuelle et cela doit changer. La pratique actuelle en matière de politique commerciale européenne a consisté à séparer les questions du bien-être animal entre, d’une part, le bien-être animal stricto sensu et, d’autre part, la conservation et le trafic d’espèces sauvages.

Le premier est généralement traité sous forme d’une brève référence à la promotion de la coopération, soit au chapitre des mesures phytosanitaires, soit, plus récemment, dans le cadre de la coopération réglementaire. Le deuxième, quant à lui, est abordé aux chapitres commerce et développement durable, généralement sous forme d’une référence au respect des engagements internationaux.

Malheureusement, cela ne suffit pas. À titre d’exemple, l’UE a libéralisé les échanges avec l’Ukraine depuis 2016 et bien que l’accord renferme une obligation pour Kiev de mettre à niveau avec Bruxelles ses normes en matière de bien-être animal, la situation ne s’est pas encore améliorée. Ainsi, nous importons des œufs pondus dans des cages à poules qui ont déjà été interdites en UE.

Rectifier les échanges commerciaux futurs

C’est pourquoi Eurogroup pour les animaux a ébauché des dispositions modèles applicables à tous les Accords de libre-échange européens futurs. Vu qu’il s’agit d’un enjeu transversal, le bien-être animal gagnerait à être traité sous forme d’un chapitre séparé, de même que les petites et moyennes entreprises et le genre. Cela n’empêcherait pas que des références au chapitre du bien-être animal soient insérées dans d’autres parties pertinentes de l’accord.

Les concepts fondamentaux sur lesquels reposent les dispositions modèles sont les suivants : Des mécanismes de coopération extrêmement robustes, pour réellement améliorer la situation sur le terrain ; la protection du droit de réglementer, pour prévenir tout effet inhibitoire sur la nouvelle législation ; ainsi qu’une libéralisation conditionnelle basée sur une équivalence des normes. Les dispositions incluent aussi des clauses sur le commerce et le développement durable, appelant l’UE à reconnaître le lien fort entre le bien-être animal et le développement durable.

À l’occasion du lancement officiel au Parlement européen le 18 octobre, la Commissaire européenne au commerce, Cecilia Malmström, a décrit les dispositions modèles comme « une proposition très intéressante pour [un meilleur traitement du bien-être animal dans le cadre de la politique commerciale européenne]. »

Karoline Graswander-Hainz (membre S&D auprès de la Commission du commerce international) a souligné à quel point les efforts d’Eurogroup pour les animaux étaient cruciaux, soulignant qu’« il est grand temps que le bien-être animal reçoive toute l’attention qu’il mérite dans le cadre de la politique commerciale européenne ».

La commissaire Malmström a aussi réagi positivement à l’idée d’une libéralisation conditionnelle basée sur une équivalence des normes et indiqué qu’une recherche approfondie pourrait être envisagée pour des produits spécifiques.

Aussi, Eurogroup pour les animaux appelle-t-il la Commission européenne à examiner les possibilités d’appliquer les dispositions modèles dans le cadre des négociations en cours, notamment avec le Mercosur, ainsi que pour celles à venir, en particulier avec l’Australie et la Nouvelle-Zélande – tous des grands exportateurs de viande vers l’UE.
Par souci du bien-être animal et du développement durable, il n’y a pas une minute à perdre.