Pour le peuple brésilien, Jair Bolsonaro est tout aussi dangereux que le COVID-19

D’après l’Organisation internationale du travail (OIT), la crise économique et de l’emploi provoquée par la pandémie de maladie à coronavirus (COVID-19) pourrait entraîner une hausse du nombre de chômeurs dans le monde qui atteindraient près de 25 millions. Pour éviter ce scenario, l’OIT recommande fermement d’élargir les dispositions de protection sociale tout en maintenant les emplois et les revenus des travailleurs.

Alors qu’aux quatre coins du monde les gouvernements annoncent prendre des mesures qui tiennent compte de ces recommandations, celui de Jair Bolsonaro au Brésil a non seulement omis de mettre en œuvre des mesures cohérentes et efficaces de protection des travailleurs, mais aussi promulgué, le 22 mars, une mesure provisoire (ou MP) n°927/2020. Dans le système politique brésilien, cet instrument donne faculté au président d’adopter des mesures qui entrent en vigueur immédiatement, sans requérir l’approbation préalable du parlement ; et c’est une modalité qui va sans nul doute se traduire par des pertes innombrables pour la classe laborieuse du Brésil.

La MP 927, comme on dénomme communément le dispositif, privilégie les accords individuels au détriment de la négociation collective et des conventions collectives, en violation de l’une des normes fondamentales du travail internationales, la Convention 98 de l’OIT sur le droit d’organisation et de négociation collective. En promulguant ce décret sans avoir établi de mécanisme de dialogue social, le gouvernent brésilien enfreint une fois de plus la Convention 154 de l’OIT, qui détaille l’obligation de consulter les travailleurs dans le cas de changements tels que ceux mis en avant par la nouvelle réforme du travail. Il convient de rappeler que le Brésil figure à l’heure actuelle sur la liste des pays comptant le plus de violations aux Conventions et Recommandations de l’OIT, telle que présentée à la Conférence internationale du travail de 2018 et de 2019. Le Brésil est accusé d’enfreindre les Conventions 98 et 154.

La MP 927 accorde bon nombre de privilèges aux employeurs, sans aucune contribution sociale ; parmi d’autres dispositions, elles autorisent la suspension des contrats d’emploi sans paiement du salaire pour une durée allant jusqu’à quatre mois. Compte tenu des pressions exercées par la CUT Brésil et la société civile brésilienne, Jair Bolsonaro a fini par révoquer, le 23 mars, l’article 18 en question.

Outre cette mesure scandaleuse, n’ayant presque pas de « nouvelles ressources », le gouvernement Bolsonaro s’est bien gardé de présenter des mesures visant à mobiliser des ressources ou à reporter ou suspendre certains paiements. La CUT Brésil en appelle au parlement pour qu’il rejette les mesures provisoires, et va également recourir à tous les organes juridiques et organisations internationales en vue d’empêcher les répercussions d’un décret si néfaste.

Au lieu de laisser le gouvernement jouer un rôle de régulation en protégeant les travailleurs, garantissant les revenus et s’assurant du fonctionnement de l’économie, Jair Bolsonaro a agi de manière négligente et criminelle dans sa réponse à la propagation du COVID-19.

Alors que plusieurs pays œuvrent à diminuer la pression exercée sur leurs systèmes sanitaires en restreignant les déplacements des personnes, Jair Bolsonaro prêche le contraire, affirmant que le coronavirus n’est rien d’autre qu’une grippe. Il dénigre les mesures de quarantaine adoptées ailleurs et, remportant le grand prix de l’absurde, appelle à manifester dans les rues, ce qui implique bien sûr que des foules se rassemblent.

Eduardo Bolsonaro, législateur fédéral qui se trouve être le fils du président, a accusé le peuple et le régime chinois d’être coupables de la pandémie actuelle de coronavirus. Ian Bremmer, président de l’Eurasia Group, un des principaux cabinets spécialisés dans le risque, a décrit récemment le président Bolsonaro comme étant « le dirigeant mondial le plus inefficace à l’heure actuelle dans sa réponse au coronavirus ».

La CUT Brésil dénonce les actions du gouvernement Bolsonaro. En condamnant les travailleurs à la maladie et à la famine, il est devenu, aux yeux du peuple brésilien, un obstacle aussi terrible et dangereux que la pandémie.