Pourquoi H&M ne fournit-il pas un salaire minimum vital à ses travailleurs ?

Les résultats de notre enquête dans la cadre de la campagne Clean Clothes sur les salaires de misère que touchent les travailleurs qui fabriquent des vêtements H&M ont récemment connu un retentissement important partout dans le monde.

En Europe, les gens ont été particulièrement choqués que l’un des pays étudiés (la Bulgarie) soit membre de l’Union européenne. La principale déception réside toutefois dans le fait qu’en dépit d’un engagement clair et largement médiatisé pour que les travailleurs perçoivent un salaire qui leur permette de mener une vie décente d’ici 2018, H&M n’a pas fait le nécessaire pour que cela soit possible.

Peu de temps après avoir appris que nous avions l’intention de publier les résultats de plusieurs mois d’enquêtes et d’interviews avec 62 travailleurs dans quatre pays, H&M a publié une déclaration proclamant que l’enseigne avait « jeté les bases pour un salaire minimum équitable » et « touché presque un million de travailleurs dans la confection ». Toutes leurs déclarations préventives de progrès ignorent la véritable promesse qu’ils avaient faite : que des salaires minimums vitaux seraient versés d’ici à cette année.

H&M devance parfois ses concurrents dans l’adoption de mesures positives en faveur d’une industrie du vêtement plus durable : l’une d’entre elles était son engagement révolutionnaire en faveur du salaire minimum vital. Cependant, nos enquêtes révèlent clairement que les paroles ne suffisent pas.

H&M n’a divulgué aucune information spécifique concernant son engagement de 2013, et ce, malgré nos demandes répétées. Nous avons cependant toutes les raisons de croire que les six usines incluses dans notre enquête reflètent la réalité de manière générale : H&M s’est attribué beaucoup de mérite pour son engagement initial, mais jusqu’à présent la société n’a toujours pas réussi à le concrétiser sous la forme d’un salaire minimum vital réel aboutissant dans les poches des travailleurs.

Et pourtant, H&M a désormais l’audace d’affirmer qu’ils ont dépassé leurs objectifs !
Cela ne peut que se retourner contre eux, car de plus en plus de gens se rendent compte que H&M essaie de réécrire l’histoire et de camoufler complètement son engagement original.

L’une des tactiques de relations publiques de H&M est de nous présenter comme allant à l’encontre de l’opinion communément admise, ce qui n’est tout simplement pas vrai. Comme à l’accoutumée, nous soutenons pleinement la liberté d’association et la négociation collective constructive et nous nous efforçons d’y parvenir.

Toutefois, l’état actuel de l’industrie du vêtement pose des problèmes majeurs. D’une part, H&M a choisi de s’approvisionner auprès d’un certain nombre de pays et d’usines où la liberté d’association est fortement entravée et où, par conséquent, il est très difficile d’obtenir un salaire de subsistance à travers le dialogue social.

Par ailleurs, H&M et d’autres marques ont un impact direct sur ce qui est possible dans le cadre de ce dialogue entre les travailleurs et leurs employeurs. L’un des aspects de ce problème est le prix que l’entreprise paie pour les vêtements prêts-à-porter.

H&M pourrait aisément puiser dans ses milliards d’euros de bénéfices afin d’augmenter ce prix et tenir compte d’un coût du travail plus élevé (qui ne représente qu’une petite fraction du prix final). La société pourrait améliorer la vie des travailleurs en leur permettant d’obtenir un salaire minimum vital sans plus tarder, tout en poursuivant les efforts à long terme auxquels elle participe à l’échelle du secteur.

L’heure est à l’action – plus aux paroles

Le fait que H&M déclare désormais qu’il n’existe pas de critère de référence universellement accepté concernant le salaire minimum vital en guise d’argument pour ne pas sortir les travailleurs de la pauvreté est une réponse incroyablement peu convaincante. Nous refusons tout simplement d’accepter cet argument et tout le monde devrait en faire de même. Dans les faits, plusieurs critères de référence existent, mais tous requièrent des actions ; pas seulement des paroles.

Il est parfaitement clair que ni les salaires minimums ni les salaires réels des travailleurs ne s’approchent des critères de référence en matière de salaire minimum vital et il incombe à H&M de combler cet écart. Non seulement parce qu’ils s’étaient clairement engagés à atteindre cet objectif en 2018, mais aussi parce que H&M et les autres enseignes ont la responsabilité globale de faire respecter les droits de l’homme dans leurs chaînes logistiques, notamment le droit à un salaire minimum vital.

Tel que nous l’avons déjà souligné, les réponses de H&M mettent toujours davantage l’accent sur les processus, sans pour autant indiquer clairement qu’ils apportent des changements réels qui se répercutent sur les fiches de paie des travailleurs.

Si vous vous placez du point de vue d’un travailleur du secteur du vêtement vivant dans la pauvreté, un processus ne permet pas de nourrir votre famille, de couvrir une urgence médicale ou encore de vous garantir un toit au-dessus de votre tête.

Les réponses apportées par H&M à la couverture médiatique de notre rapport confirment la nécessité de notre campagne #TurnAroundHM #LivingWageNow dans la mesure où H&M met tout en œuvre pour éviter l’engagement spécifique que nous soulignons et qu’ils ne respectent pas : que 850.000 travailleurs du secteur de la confection travaillant dans les usines des fournisseurs stratégiques de H&M perçoivent un salaire minimum vital d’ici à cette année.

De concert avec plus de 100.000 personnes qui ont déjà rejoint la campagne, nous continuerons à mettre en évidence le fait que H&M a la responsabilité, ainsi que les moyens financiers et autres ressources, de respecter son engagement initial et de garantir aux travailleurs un salaire minimum vital sans plus attendre. Il ne manque à H&M que la volonté politique de le faire.