Grèce: la réforme du secteur public est un « arrêt de mort » pour la main-d’œuvre

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Des milliers de travailleuses et de travailleurs grecs ont manifesté contre les nouvelles mesures d’austérité tandis qu’une nouvelle loi controversée, supprimant des milliers d’emplois dans le secteur public, était adoptée de justesse ce mercredi au parlement.

ADEDY et GSEE, les fédérations syndicales des secteurs public et privé respectivement, représentant environ 2,5 millions de travailleurs, ont appelé à la quatrième grève générale de cette année.

Ce mouvement a été précédé de manifestations d’enseignants et de travailleurs de l’éducation contre les licenciements et les fermetures d’école.

Mardi matin, les organisations ADEDY, GSEE et POE-OTA, le syndicat des travailleurs municipaux, avaient également organisé un rassemblement au centre d’Athènes, suivi d’une marche vers le parlement national.

Nikolaos Kioutsoukis, le secrétaire général du plus grand syndicat grec, GSEE, s’est exprimé devant les manifestants: « Vous, les politiciens, vous qui courbez devant la Troïka, vous nous avez trompés, vous avez détruit nos vies.

N’abusez plus de notre patience... Nous avons faim, nous n’avons plus d’emploi et nous sommes pauvres. Nous n’avons rien à craindre et rien à perdre. »

 

« Plus de sacrifices »

L’action des travailleurs de l’éducation était la dernière d’une série de grèves et de protestations de la main-d’œuvre pour dénoncer le chômage, les diminutions de salaire et la pauvreté grandissante.

Les arrêts de travail de mardi ont touché les transports urbains, les collectes d’ordures, les vols intérieurs, les services bancaires et les soins hospitaliers. L’Acropole, principale attraction touristique d’Athènes, a fermé ses portes plus tôt. Du reste, des employés municipaux, qui seront aussi touchés par les nouvelles mesures d’austérité, étaient en grève depuis lundi.

Toutefois, les services de ferry vers les îles grecques, essentiels pour la saison touristique du pays, fonctionnaient.

PAME, le syndicat du parti communiste grec (KKE), avait organisé un rassemblement distinct.

Devant le parlement d’Athènes, les manifestants ont scandé des slogans refusant d’autres sacrifices et arboré des banderoles exigeant que l’on chasse la Troïka, faisant référence à la Commission européenne, à la Banque centrale européenne et au Fonds monétaire international qui ont octroyé des prêts au pays ces trois dernières années en échange de rudes mesures fiscales et de violentes réformes structurelles.

L’adoption de la réforme du service civil était une condition préalable au déblocage de la dernière tranche du prêt de l’Union européenne et du FMI qui s’élève à plus de sept millions d’euros.

Selon la police, au moins 16.000 manifestants ont défilé dans les rues d’Athènes et ils étaient 7.000 à Thessalonique, la deuxième plus grande ville du pays. La nouvelle loi contestée prévoit le redéploiement (« mobilité ») de milliers d’agents de la fonction publique, y compris de la police municipale, qui ont déjà été touchés par des diminutions drastiques des salaires et des pensions de retraite ces trois dernières années.

Juste avant son adoption, Vasilis Polymeropoulos, le vice-président d’ADEDY, a qualifié la loi « d’erreur tragique ».

Costas Askounis, un dirigeant de la Centrale syndicale des agents des municipalités, a pour sa part déclaré « qu’ils n’étaient pas opposés à la réforme. Nous nous opposons à la suppression d’institutions entières comme la police municipale et le personnel de surveillance des écoles d’état. »

Résultat direct du vote, 4.200 fonctionnaires, y compris des enseignants, des gardiens d’école et des agents de police municipaux, participeront à un « programme de réserve mobile » en vertu duquel ils pourront être transférés contre leur gré, voire licenciés.

Ils recevront 75 pour cent de leur salaire pendant huit mois et à la fin de cette période, s’ils n’ont pas accepté un transfert vers un autre département administratif, ils pourraient perdre leur emploi.

La principale organisation syndicale, GSEE, a estimé que cette loi était un « arrêt de mort » pour la main-d’œuvre grecque de la part du FMI et des autres pays de la zone euro.

 

Taux de chômage record

Le secteur public grec avait jusqu’à présent été épargné par les réductions d’emploi dont a été victime le reste de l’économie grecque - et qui a fait grimper le taux de chômage à 27 pour cent - depuis que le pays a bénéficié de son premier renflouage international en 2010.

Pourtant, aujourd’hui, le gouvernement a été obligé de présenter une nouvelle législation et de commencer les réductions - 15.000 licenciements prévus d’ici la fin de 2014 et 12.500 transferts dans le cadre d’un programme de mobilité - pour que la Grèce puisse obtenir la tranche suivante des fonds de sauvetage.

Une partie des licenciements ont eu lieu le mois passé lorsque les autorités ont fermé la radiotélévision publique nationale ERT, mettant à la rue 2.600 personnes.

Du fait de la fermeture brutale de la télévision, le gouvernement conservateur dirigé par Antonis Samaras a perdu un jeune partenaire de la coalition et doit désormais gouverner avec une majorité réduite de cinq sièges au parlement.

La Grèce, le premier pays à avoir reçu l’aide de l’Union européenne il y a plus de trois ans, se bat pour tenter de contrôler son énorme déficit public.

L’économie grecque est dans sa sixième année consécutive de récession et le chômage se maintient à un taux record de 27 pour cent.

Le nombre de jeunes chômeurs a lui aussi atteint le taux record de 64 pour cent.

Le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, a visité Athènes jeudi pour discuter des mesures d’austérité du pays.

Le gouvernement a annoncé que tous les rassemblements et les manifestations étaient interdits à Athènes le jour de la visite de Schäuble.