Pas de miracle de Noël pour les employés d’ASOS

 

ASOS, l’un des principaux détaillants de prêt-à-porter en ligne du Royaume-Uni, a déclaré qu’il n’était pas « antisyndical », après que des travailleurs et des syndicats se soient plaints de brimades, des salaires et des conditions médiocres dans les vastes entrepôts de la société.

Leur mécontentement fait écho à celui des employés d’Amazon en Allemagne, actuellement en grève dans trois centres de logistique, dans le cadre d’un conflit de longue date avec le géant de la vente en ligne au sujet des salaires et des conditions de travail.

ASOS, qui dessert 7,1 millions de clients à travers le monde et dont le chiffre d’affaire devrait atteindre 1 milliard de livres sterling (1,6 milliard de dollars) en 2015, emploie plus de 2000 employés permanents dans ses entrepôts, ainsi que des centaines d’intérimaires, pour faire face à la demande accrue durant la période des fêtes.

Or les employés, qui sont actuellement en train d’empaqueter des millions de cadeaux de dernière minute pour les fêtes de fin d’année, parlent d’épuisement et d’exploitation lorsqu’ils font allusion aux conditions de travail dans le « fulfilment centre » (centre de réalisation) d’ASOS, dans le Yorkshire.

Une ancienne employée a confié à Equal Times : « C’était infernal. C’était vraiment intense. On était constamment sous pression. Les gens étaient sans cesse brimés parce qu’ils n’atteignaient pas leurs quotas. On faisait régulièrement l’objet de fouilles corporelles. Les fouilles étaient inappropriées et dégradantes."

« Au cours de ma vie, j’ai travaillé dans un grand nombre d’entrepôts de distribution. Mais jamais je n’avais travaillé dans un endroit où on traite les gens aussi mal. En fin de compte, je suis partie. Je n’arrivais plus à le supporter. »

Durant la période des fêtes de fin d’année, il arrive que le personnel des entrepôts doive effectuer six horaires de dix heures par semaine. Et malgré le fait qu’ils doivent parcourir des dizaines de kilomètres à pied chaque jour, ils affirment n’avoir droit qu’à 45 minutes de temps de repos, dont 15 minutes sont dépensées pour rejoindre l’aire de repos. Sur les 45 minutes de repos, 30 minutes ne sont pas rémunérées.

Les travailleurs des entrepôts touchent un salaire de base de 6,41 livres (10,45 dollars) de l’heure – seulement 10 pence de plus que le salaire minimum en Grande-Bretagne. Aucune prime n’est accordée pour travailler les jours fériés.

Un système « flexible» appliqué durant les pics de demande permet de rallonger les horaires de travail moyennant seulement deux heures de préavis. Il n’y a pas d’heures supplémentaires pour les employés permanents.

Les employés sont obligés d’utiliser un de leurs jours de congé à Noël, alors que c’est le seul jour de l’année où les entrepôts restent fermés.

Les employés accusent la direction de régulièrement manquer de comptabiliser les droits aux congés et d’éviter d’embaucher du personnel permanent.

 

« Protestez et prenez la porte »

Phil Bown, organisateur régional du syndicat UNITE pour le nord-est du Yorkshire et Humberside, a indiqué : « Les gens qui travaillent dans les entrepôts d’ASOS ont droit au strict minimum prévu par la législation britannique.

« Nous avons des membres sur place. Mais les choses s’annoncent très, très difficiles. Dans ces entrepôts, c’est la loi du « protestez et prenez la porte » qui prévaut. »

UNITE espère pouvoir collaborer avec Norbert Dentressangle (ND), un donneur d’ordre qui a assumé la gestion de l’entrepôt en août dans le cadre d’un contrat de trois ans d’une valeur de 100 millions de livres (160 millions de dollars).

Et Bown d’ajouter : « Bien que le donneur d’ordre ait changé, on y retrouve toujours les mêmes personnes. Et tout continue d’être géré de façon très stricte. Les membres de la direction sont bien payés et reçoivent des primes d’efficacité. Ils devraient traiter notre personnel avec un tant soit peu de respect. Mais ça leur importe peu. »

L’entrepôt de cinq étages, d’une superficie équivalente à cinq terrains de football, avec des voies d’accès d’une longueur de 42 kilomètres, a été érigé sur l’emplacement d’une ancienne mine de charbon, dans le village de Grimethorpe, à Barnsley. Le village a été mis à rude épreuve depuis le déclin de l’industrie minière britannique. Un an après la fermeture de sa dernière mine, en 1993, Grimethorpe s’est vu affubler du titre de village le plus pauvre d’Angleterre.

L’entrepôt ASOS a été une source cruciale d’emplois. Selon Bown, toutefois, la récession – et les réformes sociales radicales – ont créé un besoin urgent d’investissements, à tel point que les politiciens ont fermé les yeux sur les problèmes d’ASOS.

« Pour beaucoup de gens, la situation est désespérée. Mais il est impossible d’alimenter une famille avec 6,41 livres (10,45 dollars) de l’heure. Cette entreprise compte sur les subsides du gouvernement pour suppléer aux salaires des travailleurs au moyen d’autres types de prestations. »

Selon le conseiller Stephen Houghton, président du Conseil de Barnsley, les conditions dans l’entrepôt seraient raisonnables et ASOS offrirait de nouveaux emplois permanents.

« Ce niveau de salaires n’est pas inhabituel dans ce secteur.

« Ils ambitionnent de devenir un employeur de prédilection. Et il leur reste clairement beaucoup à faire pour y parvenir. S’ils peuvent offrir un meilleur salaire aux gens, nous voudrions les encourager en ce sens. »

John Williams, Business Unit Director chez Norbert Dentressangle Logistics UK: « Les taux salariaux et les conditions connexes sont débattus et approuvés en commun accord avec les représentants des employés sur le site.

« Nous rejetons formellement toutes allégations selon lesquelles les méthodes du management dans l’entrepôt seraient « antisyndicales », et d’ailleurs nous avons une longue tradition de collaboration avec divers syndicats. »

Mark Holland, directeur de la chaîne d’approvisionnement d’ASOS : « Notre activité a permis de créer des milliers de postes depuis 2011, dont bon nombre ont été occupés par des personnes qui étaient auparavant sans emploi.

« Nous avons investi plus de 20 millions de livres (33 millions de dollars) dans le site. Nous disposons également d’un programme d’investissement communautaire en soutien aux initiatives locales des jeunes dans les domaines de l’art, de la musique, de la mode, de l’éducation et du sport. »