Le lynchage de Darius, ou le coma de la République française

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L’agression ultra-violente dont a été victime Darius, 16 ans, de nationalité roumaine, et Rom, le 13 juin dernier, dans le quartier pauvre de la « cité des poètes » à Pierrefitte, Seine-Saint-Denis, a confusément bouleversé l’opinion publique française.

 

Cette confusion vient du fait que la société française est incapable de regarder le mal dont elle prise.

Le corps défiguré du jeune Darius, battu à mort dans le sous-sol d’une cité et rendu à la rue, en l’état d’encombrant dans un chariot de supermarché, est le contenu réel dont la figure de Marine le Pen est la forme d’expression sur la scène politique.

Le mal dont est pris le corps social croît à ses deux extrémités suivant un processus d’auto -alimentation: d’une part croissance de la peur et de la violence dans la population et d’autre part croissance de l’idéologie raciste-fasciste dans les élites politiques et culturelles.

La présence de Jean-Marie le Pen au deuxième tour de l’élection présidentielle française en 2002 coïncide avec le surgissement intentionnel et entretenu de la « question Rom » contemporaine sur la scène politique française, en tant que technique de gouvernement.

La « question rom » a largement été fabriquée en France, par les partis de gouvernement UMP et PS afin de capturer le socle électoral de l’extrême-droite, que ces mêmes partis ont contribué en même temps à élargir.

Car le racisme, avant d’être une mauvaise humeur populaire, illusoirement corrigible par la morale et l’éducation, est, en outre, la technique qu’un gouvernement emploie afin de diriger la majorité électorale dont il est responsable lorsque le « milieu » économique est défavorable à l’emploi et à la consommation.

Le racisme est l’action de gouverner le peuple en le détruisant. D’où que l’ensemble des partis de gouvernement a renoncé à toute action en direction des classes populaires autre que des actions de désintégration, faisant des « Musulmans » l’ennemi des « Français », et des « Roms » l’ennemi de tous.

La conséquence de cette désintégration du peuple est de livrer ses fragments atomisés à la haine et la violence et d’en faire la base électorale inculte des forces politiques qui en sont l’expression : l’extrême droite traditionnelle française, versant institutionnel de la barbarie dont le corps martyrisé de Darius porte à l’hôpital les stigmates.

Quelle démocratie resterait-il après que les élites se soient détournées des hommes et des femmes qu’elle gouverne en les jetant dans la guerre de tous contre tous ?

C’est au peuple qu’il revient de se sauver, en se réinventant à partir de lui-même, avec toutes ses composantes minoritaires intégrées. Encore une fois, ce n’est qu’au peuple rendu à sa puissance créatrice que viendra le salut public.

This article has been translated from French.