Les travailleuses méritent une justice fiscale

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La contribution des femmes à l’économie est largement sous-estimée et sous-évaluée, alors que la discrimination à laquelle elles continuent de s’affronter démontre à quel point les préjugés sexistes restent ancrés et prégnants.

La fiscalité fait partie de l’architecture qui perpétue cette injustice or nous avons un contrôle direct sur comment et qui nous taxons et comment nous dépensons les deniers publics. Une imposition progressive doit être mise en œuvre pour faciliter une participation pleine et égale des femmes au marché du travail.

Malgré tout le travail qu’elles font, un système faussé empêche les femmes de récolter pleinement les fruits de leur labeur. L’écart salarial entre les hommes et les femmes signifie que les femmes touchent 24% moins pour un travail de valeur égal.

Les femmes sont aussi surreprésentées dans l’économie informelle. Autrement dit, pas de salaires minimums, pas d’accès garanti à la justice et pas d’accès, non plus, à la protection sociale. Qui plus est, les femmes assument jusqu’à 10 fois plus de tâches de soins non rémunérées que les hommes, un travail qui forme le tissu-même des communautés mais qui n’est, pourtant, absolument pas rétribué. Tout ça sans même parler de la discrimination que les femmes affrontent à l’embauche ou la violence à caractère sexiste que nombre d’entre elles subissent au travail.

Incitation à l’inclusion

Il en résulte que les femmes sont plus pauvres que les hommes. Elles sont en outre pénalisées à outrance par des taxes régressives, notamment des taxes à taux fixe comme la TVA et la taxe de vente. Ce qui souligne d’autant plus le besoin d’efforts ciblés pour renverser cette tendance et accorder la reconnaissance due au travail des femmes. Pour commencer, les gouvernements pourraient mettre en œuvre des modalités fiscales novatrices, ciblées sur les secteurs où ces activités ont lieu.

Le recours aux titres-services prépayés dans le cas du travail domestique en est un exemple. Les travailleuses domestiques sont parmi les plus exploitées et dans ce secteur, les femmes représentent 80% de la main-d’œuvre au niveau mondial. Le caractère informel de l’emploi est l’une des principales causes de la vulnérabilité associée à ce secteur.

Les syndicats ont été impliqués dans la conception et la mise en œuvre de programmes de titres-services, qui encouragent la formalisation en offrant des avantages comme des taux d’imposition préférentiels. Des programmes d’incitation fiscale similaires existent pour la garde d’enfants. Ceux-ci permettent de libérer du temps autrement dédié à des responsabilités qui sont souvent assumées par les femmes.

Malgré les incitations fiscales offertes, il a été démontré que ces programmes sont des contributeurs nets au trésor public. Ils offrent des solutions gagnant-gagnant pour faciliter l’accès des femmes au marché du travail, tout en leur permettant aussi d’accéder à la sécurité de l’emploi, à la protection sociale, aux congés payés et à la justice.

Investir dans l’économie des soins

L’autre aspect du problème concerne l’affectation des recettes fiscales. Une étude récente de la CSI intitulée Investir dans l’économie des soins : La voie vers la croissance révèle qu’un investissement de 2 % du PIB dans l’économie des soins dans seulement sept pays permettrait de créer plus de 21 millions d’emplois.

Au lieu de cela, les budgets publics pour la protection sociale et les soins publics sont revus à la baisse, ce qui a un double impact sur les femmes : Elles éprouvent plus de difficulté à accéder à un travail décent dans des secteurs qui emploient majoritairement des femmes et ce sont généralement aussi les femmes qui finissent par combler les lacunes comme aidantes non rémunérées à la maison.

Tout progrès dépend, bien entendu, des ressources allouées. Mais en attendant, le trou dans les caisses des États ne cesse de s’agrandir : Les flux financiers illicites et le système d’imposition global en place facilitent l’évasion fiscale et permettent aux riches d’éviter de contribuer leur juste part.

L’envolée des inégalités en est une conséquence directe. Le mouvement syndical se rallie à l’appel lancé aux gouvernements et aux institutions internationales leur enjoignant de remédier à ces manquements graves de toute urgence.

La CSI est partenaire de l’Alliance globale pour la justice fiscale, qui a organisé la première édition des journées d’action mondiale pour une justice fiscale en faveur des femmes, du 8 au 24 mars 2017