La dictature Fidjienne accueillie sous les huées à Bruxelles

 

Le nom de Fidji évoque des images de carte postale, de plages paradisiaques bordées de cocotiers, mais derrière sa façade d’éden tropical se cache une dictature militaire autoritaire.

L’une des principales figures politiques de ce régime a été conspuée par un groupe de protestataires lors d’une rencontre de haut niveau à Bruxelles mercredi.

 

[caption id="attachment_3709" align="alignnone" width="530"]Depuis son accession au pouvoir à l’issue d’un coup d’État en 2006, la dictature militaire du Fidji a porté atteinte aux droits humains et mené une répression systématique contre les syndicats. (Photo/Alexandre Praça)

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La manifestation a eu lieu alors qu’Aiyaz Sayed-Khaiyum se préparait à présider la conférence du Comité ministériel commercial du Groupe des États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP), tenue dans la capitale européenne.

Outre l’office de procureur général de la république, Sayed-Khaiyum est aux commandes de quatre ministères-clés au sein du gouvernement des Fidji : Justice ; Réforme électorale ; Lutte contre la corruption et Entreprises publiques ; Industrie, Investissement, Tourisme et Communications.

Les militants ont condamné la répression croissante, au cours des derniers mois, contre des défenseurs des droits du travail et humains au Fidji, dont Sayed-Khaiyum, par son aval, s’est fait l’accessoire.

Les groupes fidjiens des droits humains ont signalé que les représailles violentes contre les tentatives de syndicalisation des travailleurs ont atteint des « niveaux inédits ».

La semaine passée, le secrétaire national du Congrès des syndicats de Fidji, Felix Anthony, a exprimé son inquiétude face au climat d’intimidation au milieu duquel lui-même et ses collègues doivent travailler.

Anthony a, lui-même, été battu par la police et a passé huit jours en prison « sans raison ».

L’archipel des Fidji, qui compte une population de plus de 800,000 habitants, est dirigé par une junte militaire qui a accédé au pouvoir à l’issue d’un coup d’État en 2006.

En 2009, le gouvernement a institué diverses mesures qui visaient à réprimer les assemblées publiques, censurer les médias et à brider les groupes organisés au sein de la société civile.

Dans le cadre de ses fonctions de procureur général, Sayed-Khaiyum a été personnellement responsable de la rédaction et de la promulgation de la majorité des nouveaux décrets exécutifs répressifs.

La législation antisyndicale extrêmement restrictive de Fidji a suscité de vives critiques de l’Organisation internationale du travail, suivies de l’envoi d’une mission de l’ONU dans l’archipel le mois dernier.

Cette mission – qui incluait un membre de la Cour internationale de justice – a, cependant, été expulsée quelques heures seulement après son arrivée aux Fidji.

L’ordre d’expulsion est tombé après que des délégués de l’ONU aient exprimé leur objection aux nouvelles règles imposées par le cabinet du Premier ministre, qui restreignaient leurs travaux d’investigation et les empêchaient de s’entretenir avec des membres des syndicats.

Les autorités fidjiennes se sont défendues de tout manque de transparence.

« Nous nous réjouissons de ces visites, pour autant qu’elles soient menées par une délégation indépendante et qu’elles ne répondent pas à des résultats prédéterminés, ni à des ordres du jour ciblés », a déclaré le gouvernement dans un communiqué officiel.

L’incident a entraîné une détérioration accrue des relations déjà tendues entre les autorités fidjiennes et la communauté internationale.

Au début de cette année, les États-Unis ont décidé d’accéder à une pétition demandant la suspension des préférences commerciales des Fidji sur la base de violations des droits travailleurs.

Selon des termes similaires, le Conseil de l’Europe a étendu ses sanctions commerciales contre le pays, sur la base des restrictions continues imposées aux droits humains.

Mercredi, à Bruxelles, la dictature fidjienne a tenté de balayer la poussière sous le tapis en assumant le rôle de protagoniste lors de la rencontre de l’ACP, à laquelle assistaient 79 pays.

« En leur permettant de présider cette réunion, vous honorez le régime, ce qui est, d’après nous, parfaitement honteux », s’est indigné Jaap Wienen, secrétaire général adjoint de la Confédération syndicale internationale en interpellant un responsable de l’ACP venu s’adresser aux manifestants rassemblés devant le siège de l’organisation à Bruxelles.

Les autorités fidjiennes n’ont pas manqué de tourner à leur avantage leur présence à cet événement prestigieux.

« Le fait d’être invités à présider les rencontres de l’ACP représente un nouvel accomplissement majeur pour Fidji. Cela vient consolider le rôle de Fidji en tant que protagoniste sur la scène internationale », a affirmé Sayed-Khaiyum dans un communiqué de presse.