Un jeune blogueur incarcéré aux Émirats arabes unis

 

Alors que le monde entier célèbre la Journée internationale des droits de l’homme, lundi, la nouvelle de l’arrestation d’un blogueur de 18 ans aux Émirats arabes unis a suscité l’indignation générale.

[caption id="attachment_5066" align="alignnone" width="530"] Le prince héritier Sheikh Mohammed bin Zayed Al Nahyan des Émirats arabes unis s’entretient avec le président russe Vladimir Putin (AP Photo/Maxim Shipenkov) 

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Les autorités des Émirats arabes unis ont recours à de nouveaux décrets répressifs qui définissent comme une infraction criminelle le recours à l’Internet pour critiquer l’État et ses institutions - ou pour se moquer de ses dirigeants.

D’après l’organisation Emirates Centre for Human Rights, basée à Londres, un adolescent répondant au nom de Mohammed Salem al-Zumer a été arrêté mercredi à son domicile, à Sharjah, émirat situé au nord de Dubaï.

Al-Zumer se trouve accusé d’avoir publié sur la toile des commentaires en soutien à des prisonniers d’opinion connus.

L’organisation informe qu’al-Zumer est le fils d’un poète célèbre des Émirats et que sa mère est la sœur de Khaled al-Sheiba al-Nuaimi, qui fut lui-même arrêté en juillet.

L’arrestation d’al-Zumer a été confirmée par le Gulf Centre of Human Rights, qui précise que son domicile a fait l’objet d’une perquisition de plus d’une heure et qu’un mandat a été délivré à cette fin justifiant la mesure au titre d’« affaire relevant de la sûreté de l’État ».

 L’arrestation a été effectuée en vertu de nouvelles lois promulguées sous forme de décrets présidentiels en novembre. Ceux-ci prévoient, notamment, des peines minimales de trois ans d’emprisonnement pour la cyber-dissidence. La nouvelle législation couvre toute personne qui a recours aux réseaux sociaux ou à un site web pour « porter atteinte » à l’État ou « calomnier » ses institutions.

La mesure intervient à l’heure où 193 pays entament une deuxième semaine de pourparlers concernant un projet de réforme controversé de l’ONU visant les réglementations afférentes aux télécommunications internationales (RTI) et l’inclusion de l’Internet au nombre de ses attributions.

Plus de 900 amendements aux dits RTI ont été proposés, allant du blocage de spams à une nouvelle tarification en matière d’itinérance mobile.

La Conférence mondiale sur les télécommunications internationales (CMTI-12) se déroule à Dubaï au milieu de critiques grandissantes émanant de militants des droits civils, de syndicats et de grandes sociétés internationales du secteur.

Celles-ci mettent en garde contre un train de réformes proposé par un bloc de pays qui inclut la Chine, l’Égypte et l’Arabie Saoudite, qui pourraient accorder le « blanc-seing » de l’ONU à des mesures nationales de contrôle sur l’Internet.

L’Union internationale des télécommunications (UIT), instance onusienne en charge des télécommunications, a également été accusée d’agir dans le secret, en laissant à la discrétion de pays individuels la possibilité de rendre publiques leurs propositions au lieu de les rendre publiques elle-même.

 

« Deep Packet Inspection »

La conférence a, par ailleurs, été perturbée par ce qui été signalé comme une attaque de hackers, suite à l’adoption d’un train de normes se rapportant au « deep packet inspection » (inspection approfondie des paquets – IAP), sur lesquelles les parties à la conférence ont été fortement divisées.

Celles-ci avaient initialement été présentées lors d’une session de l’Assemblée mondiale de normalisation des télécommunications.

L’« inspection approfondie des paquets » est une technologie utilisée par les firmes de télécommunication pour obtenir une vue d’ensemble du trafic, y compris le nombre d’appels bloqués ou perdus.

Elle peut, cependant, aussi servir à épier des utilisateurs individuels, pour déterminer les sites qu’ils visitent, ainsi que le type et la quantité de données utilisées.

Dans un entretien avec la BBC, le Center for Democracy & Technology, à Washington, s’est dit extrêmement préoccupé par son adoption : « L’organe des Nations unies chargé des télécommunications a entériné, en catimini, la normalisation de technologies qui pourraient permettre à des gouvernements et à des sociétés de passer au crible la totalité du trafic internet d’un utilisateur – y compris courriels, transactions bancaires et appels vocaux.

« La démarche laisse suggérer que certains gouvernements soient en faveur d’un monde où même les communications chiffrées ne seraient plus à l’abri des regards indiscrets. »

 Au cours du dernier mois, Sharan Burrow, secrétaire générale de la Confédération syndicale internationale (CSI), a été à la tête d’une campagne réclamant un débat plus inclusif et plus transparent concernant ces réformes.

« Ce débat doit être élargi à l’ensemble des parties prenantes et des cybercitoyens.

Il n’y a pas eu consultation sur ces propositions qui accordent aux gouvernements et aux entreprises de par le monde le pouvoir, non seulement de faire payer aux utilisateurs l’accès à des services comme le courriel et Skype mais aussi de restreindre l’accès à l’Internet et de surveiller nos moindres activités en ligne », a indiqué Sharan Burrow.

« Les nouvelles règles porteront aussi atteinte aux citoyens de pays plus pauvres et, plus particulièrement, à ceux vivant sous des dictatures… comme nous pouvons d’ores et déjà le constater dans certains pays. »