Lancement du Sommet du L20 à Ankara malgré les piètres résultats turcs en droits au travail

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Mercredi, des représentants du mouvement syndical mondial et d’organisations syndicales turques ont officiellement lancé le Sommet du Groupe syndical 20 (L20) à Ankara.

Rejoints par de hauts responsables du gouvernement turc, dont le vice-premier ministre Ali Babacan — en charge de l’économie, les dirigeants syndicaux ont fait connaître les principales revendications qu’ils entendent défendre au cours de la présidence de la Turquie du G20 en 2015.

Ergün Atalay, président de TÜRK-İŞ et du Comité d’organisation du L20 en Turquie, s’est adressé aux participants de la réunion du L20 : « Exactement comme la source de nombreux problèmes, nous savons que leur solution se trouve au niveau mondial. »

« Nous allons transmettre nos revendications aux chefs d’État et de gouvernement du monde entier, exigeant que les travailleurs et leurs familles reçoivent leurs parts des bénéfices générés par la croissance économique et la mondialisation, et qu’ils puissent s’organiser et travailler dans des conditions de dignité humaine », a déclaré Ergün Atalay.

Le L20 est un « groupe d’engagement » du G20 composé d’organisations syndicales de pays du G20 rassemblées sous l’égide de la Confédération syndicale internationale (CSI) et de la Commission syndicale consultative auprès de l’Organisation de coopération et de développement économiques.

Tout au long de la présidence turque du G20, la Confédération des syndicats turcs (TÜRK-İŞ), la Confédération des syndicats progressistes de Turquie (DISK) et HAK-İŞ forment le Comité d’organisation du L20 en Turquie.

Pour les dirigeants syndicaux présents à la réunion, la crise financière internationale et les politiques d’austérité adoptées en réponse ont eu des effets négatifs disproportionnés sur la main-d’œuvre, surtout en augmentant la pression du fait du recours à la sous-traitance, à l’externalisation et à l’emploi informel.

Selon un Rapport de suivi politique du L20 de 2014, la moitié des politiques du G20 se sont révélées « inefficaces ».

« Les inégalités font qu’il est impossible d’instaurer une croissance pérenne », a déclaré Ali Babacan dans son allocution au Sommet du L20.

« La croissance n’est durable que lorsqu’elle bénéficie à tous les segments de la société », a-t-il ajouté, « autrement, nous parlons de croissance dont la durée de vie s’apparente à celle d’un feu de paille. »

D’une certaine façon, les syndicats étaient satisfaits du lancement.

« Le vice-premier ministre a reconnu les fléaux que sont le chômage et l’inégalité, et a admis que la croissance allait de pair avec l’emploi », a expliqué Sharan Burrow, la secrétaire générale de la CSI, à l’équipe d’Equal Times dans la foulée du lancement du L20.

Après la décision inhabituelle de la présidence australienne du G20 d’exclure les syndicats des discussions officielles avec les dirigeants des pays du G20, Sharan Burrow a déclaré qu’elle « appréciait l’engagement sans condition » de la Turquie envers l’organisation d’une réunion commune entre les ministres du Travail et des Finances.

Elle a néanmoins noté que le G20 devait relever un défi particulier, à savoir créer des emplois en pleine transition vers une économie à faibles émissions de carbone.

 

Quelques vérités

Toutefois, au cours du lancement du L20, les syndicats turcs ont demandé au gouvernement de reconnaître que les conditions de travail en Turquie figurent parmi les plus dangereuses au monde.

« En 2013, en Turquie, 1356 travailleurs assurés ont perdu la vie lors d’accidents du travail et en 2014, leur nombre s’est encore accru. La Turquie occupe de ce fait la troisième place au niveau mondial et la première au niveau européen en termes d’accidents du travail mortels », a déploré Ergün Atalay, estimant que la sécurité et la santé au travail, la formation, la sécurité sociale et les soins de santé sont des points clés dont devront discuter les membres du G20.

Selon l’Indice CSI des droits dans le monde, en Turquie, « les droits ne sont pas garantis » et le pays figure parmi « les pires nations au monde pour y travailler ».

Alors qu’Ali Babacan rencontrait les membres du L20, une foule de syndicalistes de l’organisation Birleşik Metal-İş s’étaient rassemblés devant l’hôtel d’Ankara dans le cadre d’une série de manifestations organisées dans la capitale turque pour protester contre une récente décision des autorités d’interdire une grève des métallurgistes, arguant que cette dernière constituait une menace pour la sécurité nationale. Des salariés de 38 entreprises métallurgiques ont entamé une grève le 29 janvier 2015.

« Il n’est pas concevable que toutes ces infractions aux droits syndicaux se produisent dans un pays qui préside le G20. L’interdiction de cette grève est de trop.

Une grève est la dernière mesure que des travailleurs peuvent prendre pour défendre leurs droits. Sans droit de faire grève, nous sommes des esclaves », a déclaré Kivanc Eliacik, du Département des relations internationales de DISK.

Kivanc Eliacik a poursuivi en expliquant qu’Ali Babacan avait approuvé la décision du gouvernement turc d’interdire la grève pendant 60 jours.

La CSI a déclaré que des représentants avaient rencontré le vice-premier ministre à ce propos.

Et Sharan Burrow de conclure : « La communauté syndicale internationale soutient évidemment le droit des travailleuses et des travailleurs de faire grève.

Pour nous, le dialogue et la négociation permettront d’aboutir à une solution. Le droit de grève est essentiel pour la démocratie. »