Le combat des femmes de ménage grecques contre l’austérité

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Un groupe de 30 femmes de ménage grecques ont assisté à la séance plénière du Parlement européen le 16 septembre à Strasbourg, un an jour pour jour après avoir été licenciées par surprise par le ministère grec des Finances.

Toutes vêtues du même T-shirt rose, elles ont levé une main portant un gant de ménage rouge pour appeler à la solidarité de l’Europe à l’égard du combat qu’elles mènent pour retrouver leur emploi.

« Il y a un an, on a décidé de nous anéantir. On a décidé que nous n’étions que des numéros, pas des êtres humains » déclare Dimitra Manoli, une des 30 femmes de ménage invitées au Parlement par des députés européens du parti grec de gauche Syriza.

Ces 30 femmes de ménage font partie des 595 employés – essentiellement des femmes entre 45 et 60 ans – qui travaillaient pour le ministère des Finances et qui ont été licenciés le 17 septembre 2013 afin d’être remplacés par des agents d’une entreprise de nettoyage privée sous-traitante.

Leur salaire mensuel était compris entre 205 et 757 euros (net), d’après leur avocat, Yannis Karouzos, et leur licenciement s’inscrivait dans le cadre des réductions des dépenses publiques imposées par la troïka des créditeurs internationaux de la Grèce (l’Union européenne, le Fonds monétaire international et la Banque centrale européenne).

Depuis lors, ces femmes de ménage manifestent tous les jours devant le ministère, et symbolisent désormais la résistance contre les politiques d’austérité de l’UE.

Lors des différentes manifestations, la police anti-émeute grecque a violenté à maintes reprises les femmes de ménage au point que bon nombre d’entre elles ont dû se rendre à l’hôpital, couvertes de traces de coups.

« Nous sommes venues à Strasbourg pour faire connaître notre problème et pour demander de l’aide, parce que dans notre pays, en Grèce, nous n’obtenons que de la violence en réponse à notre lutte » explique Evaggelia Giannaki, une femme de 45 ans qui a été licenciée après avoir travaillé pendant 13 ans au ministère.

« Le plus gros problème, c’est qu’à notre âge et avec ce chômage omniprésent, il nous est complètement impossible de trouver un nouvel emploi ».

« À 45 ans, je veux travailler, mais je suis condamnée à rester au chômage. Même le Fonds social européen est destiné aux jeunes chômeurs. Et nous alors ? »

« Ces femmes de ménage mènent une lutte exemplaire pour la dignité » affirme Konstantina (également connue sous le nom de Konstandinka) Kuneva, la députée européenne grecque d’origine bulgare, également membre fondatrice du Syndicat des agents d’entretien et des travailleurs domestiques.

« Malheureusement, bien que des milliers de travailleurs aient été touchés par les politiques de la troïka, ils ne sont pas très nombreux à poursuivre le combat et à résister » souligne Kuneva, en demandant aux députés européens et aux journalistes de soutenir les syndicats et de coordonner les mesures contre le travail précaire et les licenciements.

 

Contraire à l’intérêt public

Au début de l’année, une décision de justice a ordonné au ministère grec des Finances de réintégrer les 595 femmes de ménage, leur licenciement étant jugé « contraire à l’intérêt public ».

Au lieu de cela, l’État grec a fait appel à la Cour suprême, dont le verdict sera rendu le 24 février 2015.

Des indiscrétions révèlent qu’une recommandation du responsable de la Cour suprême, le juge Christoforos Kosmidis, a annulé le premier jugement, précisant que le licenciement définitif des femmes de ménage relevait du « droit de l’État grec de supprimer des emplois existants dans le secteur public et de suspendre des fonctionnaires pour des raisons d’intérêt public selon des critères rationnels ».

Député du parti Syriza et vice-président du Parlement européen, Dimitris Papadimoulis signale à Equal Times : « Le verdict n’a pas encore été rendu. Cette information a filtré illégalement ».

« Les femmes de ménage seront présentes au tribunal et elles poursuivront leur combat quoi qu’il arrive ».

Equal Times a contacté la porte-parole du gouvernement, Sofia Voultepsi, mais elle a refusé de commenter la situation.

Un mouvement de solidarité internationale visant à soutenir les femmes de ménage grecques a pris de l’ampleur au cours de l’année passée et des actions ont été organisées en Europe le 20 septembre.

Eric Neuprez, qui s’occupe du secteur du nettoyage au sein du syndicat belge FTGB, confie à Equal Times : « Ce qui est arrivé à ces femmes grecques, qui travaillent dans le secteur sensible du nettoyage, est représentatif de ce qui se passe dans de nombreux pays ».

Par exemple, les agents d’entretien belges de la gare ferroviaire Schaarbeek, à Bruxelles, sont en grève depuis le 21 août pour demander à leur employeur, le sous-traitant BM&S, de réintégrer les représentants syndicaux, qui ont été licenciés illégalement.

Ils ont également organisé une action de solidarité le 19 septembre à l’égard des femmes de ménage grecques.

Tony Hatbois, de CGT France, la confédération générale du travail du pays, était présent lui aussi au Parlement européen pour apporter le soutien moral et financier des syndicats français aux femmes de ménage grecques.

Et au Royaume-Uni, la centrale syndicale Trades Union Congress (TUC) a soutenu une manifestation organisée par la campagne de solidarité pour la Grèce, Greece Solidarity Campaign, devant le Centre hellénique de Londres.