L’ONU toujours sous le feu des critiques syndicales pour le non-respect des droits des travailleurs

 

Les récents changements au processus de négociation entre employés et direction au sein de l’Organisation des Nations Unies vont à l’encontre des conventions de l’organisation et pourraient nuire à la sécurité du personnel, avertissent les syndicats.

Depuis juillet de cette année, la direction est tenue d’avoir des « consultations » plutôt que d’engager des négociations obligatoires avec le personnel à propos d’enjeux comme la répartition des coupes budgétaires et la politique de rotation.

Les nouvelles règles sont venues se substituer à un accord antérieur qui avait été introduit par le secrétaire général Ban Ki-moon en 2011.

« Il existait bel et bien une forme de négociation collective mais celle-ci a désormais cessé d’exister », a dit Sharan Burrow, secrétaire générale de la Confédération syndicale internationale (CSI).

« Rogner le pouvoir des syndicats, c’est bien de cela qu’il s’agit », affirme Ian Richards, vice-président du Conseil de coordination du personnel de l’ONUG.

« Les États membres voient les syndicats des personnels comme une sphère d’influence parallèle et ils veulent pouvoir dire au secrétaire général ce qu’il doit faire. »

Dans une lettre ouverte à Ban Ki-moon, Frances O’Grady, secrétaire général de la centrale syndicale britannique Trades Union Congress (TUC) a fait remarquer que l’Organisation internationale du travail – une agence de l’ONU – protège la liberté d’association et le droit de négociation collective.

Ces droits sont, tous deux, inscrits dans la Déclaration de Philadelphie, où sont énoncés les buts et objectifs de l’OIT.

Dans sa réponse, le sous-secrétaire général chargé de la gestion de l’ONU, Yukio Takasu, a indiqué qu’il incombait à l’Assemblée générale de fixer les conditions des travailleurs à travers le Statut du personnel de l’ONU, lequel Statut n’inclut pas le droit de négociation collective.

En avril dernier, l’Assemblée générale a voté en faveur d’une révision des règles relatives aux négociations du personnel, aux fins de refléter les règles moins strictes.

Dans une lettre adressée à O’Grady, le ministre britannique des Affaires étrangères, William Hague, a affirmé que « le gouvernement soutenait pleinement cette décision dès lors qu’elle protège le principe établi selon lequel les États membres de l’ONU devraient avoir le dernier mot concernant les enjeux importants [en matière de ressources humaines]. »

Selon Richards, toutefois, la crainte liée au fait que le cadre antérieur permettait aux syndicats d’accéder au rang de coadministrateurs dotés d’un droit de véto sur les changements administratifs était dénuée de fondement.

« Les États membres ont cru que les syndicats des employés avaient un droit de véto. Et ils ont donc dit « cette fois c’en est trop, on ne peut pas le permettre ».

Nous ignorons comment ils en sont arrivés à une telle conclusion mais c’est certainement sur cette base qu’ils ont adopté la résolution. »

Une campagne opposée aux changements a rallié le soutien de syndicats comme le BTUC, la CSI et l’American Federation of Teachers.

« L’une des préoccupations du groupement Global Unions est que si l’ONU, qui est censée être la gardienne des droits des travailleurs dans le monde ne respecte et n’applique pas ces droits sous son propre toit, cela pourrait inciter des gouvernements à les supprimer au niveau national », a signalé Richards.

Equal Times et LabourStart ont lancé des campagnes de pétition en ligne adressées au secrétaire général lui demandant instamment de revenir sur sa décision.

Une rencontre à récemment eu lieu entre Ban Ki-moon et les syndicats où le secrétaire général de l’ONU a proposé la mise sur pied d’un groupe de travail chargé de la rédaction d’un nouveau projet d’accord qui régirait les relations entre les employés et la direction.

« Nous voudrions connaître la portée du groupe de travail », a dit Richards. « Si sa portée se limite simplement à réécrire ce qui existe déjà, cela présente moins d’intérêt pour nous. »

D’après Richards, les voies de recours actuellement à la disposition du personnel pour soulever des préoccupations en matière de sécurité, à savoir via le Réseau inter-agences pour la gestion de la sécurité, sont insuffisantes dès lors qu’elles ne leur permettent pas de négocier ou de soumettre leurs propres propositions.

« La direction veut envoyer plus de personnel sur le terrain mais nous ne pouvons pas négocier les conditions de sécurité », a-t-il indiqué.

« Quels types de véhicules seraient mis à leur disposition, si leur sécurité serait assurée par des personnels professionnels de l’ONU ou des agences de sécurité privées, ce qui est, en soi, problématique. »

Le bureau du secrétaire général n’a pas donné suite à l’appel à commentaires.