Strasbourg appelée à statuer sur la législation antigrève du Royaume-Uni

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Une décision de la Cour européenne des droits de l’homme est attendue prochainement concernant la recevabilité du recours légal introduit par le syndicat des travailleurs du transport RMT, du Royaume-Uni, contre une législation nationale qui restreint le droit de grève.

Selon le RMT – syndicat national des travailleurs ferroviaires, maritimes et du transport -, plusieurs lois introduites en Grande-Bretagne dans le courant des années 1990 portent atteinte aux droits d’association et d’assemblée pacifique, des droits inscrits dans la Convention européenne des droits de l’homme.

 

[caption id="attachment_3231" align="alignnone" width="530"]Le syndicat britannique des travailleurs du transport RMT en appelle à la Cour européenne des droits de l’homme pour obtenir l’assouplissement de la législation restrictive de la Grande-Bretagne en matière de grève. (Photo/RMT Images/Roslyn Gaunt)

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Ces lois soumettent le vote d’une grève à des procédures complexes et interdisent les actions « secondaires », c’est-à-dire les arrêts de travail en soutien à des grèves ailleurs.

Des rapports récents parus dans la presse britannique selon lesquels la CEDH, à Strasbourg, avait accepté de juger l’affaire ont suscité des réactions virulentes dans les rangs des Conservateurs.

Parmi elles, celles du maire de Londres, Boris Johnson, qui aurait déclaré au quotidien Daily Mail qu’il serait « totalement inacceptable » qu’un tribunal européen statue sur l’assouplissement des restrictions britanniques en matière de grève.

En revanche, il a insisté sur la « nécessité pressante de lois plus strictes concernant les grèves vexatoires. »

Des sources officielles à Strasbourg ont informé Equal Times que la CEDH continue d’évaluer la recevabilité de la procédure.

Elles ont indiqué que la CEDH avait demandé par écrit au RMT et au gouvernement britannique de lui fournir une information plus détaillée sur les cas spécifiques à l’origine du recours.

 En vertu du droit britannique, les syndicats sont tenus de délivrer un préavis s’ils projettent d’inviter leurs adhérents à voter sur une grève et doivent fournir des précisions quant aux catégories de travailleurs qui seront appelés à voter.

En 2009, suite à un différend salarial au sein de l’entreprise de production et de distribution d’électricité EDF Energy Powerlink, le RMT a informé la direction qu’elle appellerait les ingénieurs et les techniciens à voter sur une grève possible.

Toutefois, l’employeur a affirmé qu’il ne reconnaissait pas le terme « technicien » et est parvenu à obtenir une injonction du tribunal pour interdire la grève.

La seconde affaire dont la CEDH a été saisie concernait une grève au sein d’une entreprise répondant au nom d’Hydrex Equipment (UK) Ltd, en 2009, convoquée après que des travailleurs syndiqués dans deux firmes qui collaboraient étroitement avec Hydrex se sont vus interdire l’organisation d’un débrayage solidaire.

Bob Crow, secrétaire général du RMT, avait déclaré en 2010 que son syndicat s’était vu contraint de saisir la Cour européenne des droits de l’homme parce que « le droit de cessation de travail, un droit humain fondamental, a été systématiquement bafoué ».

Les avocats du syndicat sont confiants que la Cour de Strasbourg accordera gain de cause au syndicat.

Ils invoquent les conclusions d’une commission d’experts de l’Organisation internationale du travail, en 2009, qui avait relevé la nécessité de simplifier les règles afférentes aux scrutins de grève au Royaume-Uni et d’assurer que les lois relatives aux grèves secondaires sont conformes aux Conventions de l’OIT.

 D’après la commission : « Les travailleurs devraient pouvoir prendre part aux grèves de solidarité pourvu que la grève initiale qu’ils soutiennent soit légale, de même qu’ils devraient pouvoir entreprendre une action collective concernant des enjeux sociaux et économiques qui les concernent de près, quand bien même leur employeur n’est pas partie au différend. »

Les avocats ont également relevé les conclusions du Comité européen des droits sociaux (CEDS), en 2010, selon lesquelles les lois britanniques « excessives » concernant les scrutins de grève enfreignaient la Charte sociale européenne.

Entre temps, une proposition présentée par le ministre britannique des Finances, George Osborne, qui vise à inciter les salariés à renoncer à leurs droits en tant que travailleurs –comme le congé parental ou la protection contre le licenciement arbitraire – en échange d’une participation au capital de l’entreprise a provoqué un tollé au Parlement européen la semaine dernière.

« Cette proposition est innommable, un véritable pied de nez aux pressions financières et aux préoccupations qui tourmentent les salariés, un vulgaire paiement en échange des droits des travailleurs », s’indigne Hannes Swoboda, président du groupe Socialiste et Démocrate au Parlement européen.

« Cette proposition va à l’encontre de toutes les valeurs européennes que nous défendons », a-t-il conclu.