Les militants saluent les avancées en faveur d’une taxe sur les transactions financières

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Les militants syndicaux et les représentants de la société civile ont salué les dernières avancées en faveur d’une taxe sur les transactions financières (TTF). Le mois dernier, les ministres des Finances de dix pays de l’Union européenne (UE) ont convenu du champ d’application de la taxe, qui, si elle est adoptée, permettrait de générer des fonds pour le secteur public et de limiter le pouvoir du secteur financier.

Julian Scola, directeur de la communication au sein de la Confédération européenne des syndicats (CES), a expliqué à Equal Times : « Une taxe sur les transactions financières revêt une grande importance pour les travailleurs avant tout parce qu’elle donnera aux finances publiques le coup de pouce tant attendu pour réaliser les investissements qui permettront de lutter contre le chômage, de générer de la croissance, de rendre l’Europe plus compétitive et de faire face à la crise des réfugiés.

Pour toutes ces raisons, l’Europe doit investir dans l’éducation et la formation, les infrastructures, la transition vers une économie à faible émission de carbone, la recherche et le développement ainsi que dans les secteurs de la santé, du logement et de l’aide sociale. »

La décision prise au mois de décembre est l’étape la plus récente de négociations qui se poursuivent depuis la crise financière et l’adoption de différents plans d’aide en faveur des banques. Mais si la taxation du secteur financier a été inscrite à l’ordre du jour de nombreux gouvernements, plusieurs détails clés, tels que le taux de la taxe, ont été encore une fois été remis à plus tard, dans ce cas précis jusqu’à l’été 2016.

Dans une déclaration publiée après cette décision, la Fédération syndicale européenne des services publics a qualifié de « mascarade » les « éternels reports » du processus. En 2012 déjà, le Parlement européen avait voté à une écrasante majorité l’entrée en vigueur de la taxe pour 2014. Mais les pourparlers en vue d’une TTF à l’échelle européenne ont rapidement été abandonnés en raison des désaccords quant à la portée de la taxe et au déroulement des négociations.

Le groupe d’action britannique Robin Hood Tax reste toutefois optimiste. Son porte-parole, Simon Chouffot, confie à Equal Times : « C’est une excellente nouvelle que les dix pays aient réaffirmé leur engagement.

Assujettir le secteur financier à une nouvelle taxe n’a jamais été une tâche facile, mais les choses se mettent en place petit à petit. Qui plus est, il semble y avoir une volonté d’élargir autant que possible le champ d’application de la taxe afin d’y inclure les produits dérivés. »

 

Une taxe difficilement contournable

En effet, l’accord entre l’Allemagne, la France, l’Italie, l’Autriche, la Belgique, la Grèce, le Portugal, la Slovaquie, la Slovénie et l’Espagne laisse entrevoir une taxe étonnamment efficace.

Cette taxe s’appliquerait aux vendeurs comme aux acheteurs et serait assise à la fois sur le lieu d’émission et le lieu de résidence. Ainsi, serait soumis à la taxe tout individu engagé dans une opération financière avec un acteur basé dans un des pays participants. Par conséquent, la seule façon d’y échapper serait de se couper des pays qui représentent à eux seuls les deux tiers de l’économie de l’UE.

Cela dit, rien n’est encore fait, comme le précise Chouffot : « Le processus est loin d’être terminé, et c’est aux négociateurs et aux dirigeants de tenir tête aux banques — qui, comme nous le savons, exercent une pression acharnée dans la défense de leurs intérêts — et de mettre en œuvre la meilleure version possible.

Des décisions majeures doivent être prises concernant le mode de perception et le champ d’application de la taxe. Mais la question cruciale est celle des produits dérivés. C’est absurde de concevoir un récipient pour la collecte des taxes, puis d’en faire une passoire à force de le percer de trous. Voilà pourquoi nous devons soutenir fermement l’idée initiale d’une taxe ambitieuse. »

À l’heure actuelle, les dix pays de l’UE prévoient une exonération limitée aux activités de tenue de marché (effectuées par des intermédiaires qui achètent et vendent des actions pour maintenir la liquidité sur les marchés financiers).

Les militants soutiennent que la TTF est un moyen simple de recueillir des fonds qui profiteront à la société en général. Étant donné l’ampleur du secteur financier, un taux ne serait-ce que de 0,01 % permettrait de lever des milliards sans pression aucune, ou presque, sur l’économie réelle. Ces recettes supplémentaires pourraient permettre aux pays de revoir leurs politiques budgétaires et d’éviter les coupes franches que connaît aujourd’hui le secteur public dans toute l’Europe.

Chouffot a également souligné l’importance de la dimension internationale de la taxe, car les crises financières affectent le monde entier. « Au cours d’une récession, les flux d’aide se tarissent alors que les économies en développement se contractent. La TTF peut lever des fonds pour combler cet écart. Nous avons de bonnes raisons de penser que la France en particulier, mais aussi l’Allemagne, utiliseront au moins une partie de ces fonds à l’échelle internationale. »

La France, l’Espagne et l’Allemagne ont également indiqué qu’une partie des recettes ainsi générées serait consacrée à l’aide climatique, sans avancer de chiffres. Les pays industrialisés ont convenu depuis longtemps de participer au financement de l’adaptation au changement climatique des pays en développement, mais la provenance des fonds reste un sujet épineux.

Les militants affirment qu’une taxe sur les transactions financières favoriserait également la stabilité des marchés financiers, ce qui profiterait à l’ensemble de l’économie. Toutes les transactions étant concernées, le trading haute fréquence généré par des algorithmes informatiques, de plus en plus prisé, serait donc soumis à des taxes plus lourdes. La TTF pourrait alors servir à décourager ces activités hautement spéculatives.

La victoire la plus retentissante pourrait cependant être emblématique : l’adoption de la TTF montrerait enfin que les États européens font passer les citoyens avant les profits du secteur financier.

 

Cet article a été traduit de l’anglais.