Agir en faveur des enseignants en ces temps de crise

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La Journée mondiale des enseignants, 5 Octobre, est célébrée annuellement en reconnaissance de la contribution formidable des enseignants au progrès de la société et des générations futures.

Il est pourtant difficile d’améliorer la situation des enseignants ou de parvenir à une éducation de qualité pour tous en l’absence d’un financement adéquat. Et c’est d’autant plus difficile en temps de crise.

Selon les données les plus récentes de l’Institut de statistique de l’UNESCO (UIS), la moitié des pays du monde consacrent entre 3,4 et 5,7 pour-cent de leur PIB à l’éducation, ce qui place la moyenne globale à 4,7 pour cent.

Les chiffres varient, toutefois, fortement selon la région.

D’après le Rapport mondial de suivi, « Bien que les pays à faible revenu aient augmenté la part de leur revenu national consacrée à l’éducation, passée de 2,9 à 3,8 % depuis 1999, certaines régions et certains pays ont continué de négliger l’éducation. L’Asie centrale et l’Asie du Sud et de l’Ouest sont les régions qui investissent le moins dans ce domaine. »

Cuba, par exemple, investit 13,38 pour cent de son PIB dans l’éducation, cependant que les Émirats Arabes Unis ne lui consacrent que 0,99 percent de leur PIB.

C’est pourquoi l’Internationale de l’éducation (IE) appelle les gouvernements à investir au moins 6 pour cent de leur PIB national dans le corps enseignant et l’éducation.

Le thème de la Journée mondiale de cette année - « Agissons pour les enseignant(e)s » - est un cri de ralliement qui s’adressé à quiconque attache de l’importance à l’éducation et nous appelle à valoriser la profession enseignante et à prendre position en sa défense.

La date de la Journée mondiale des enseignants trouve son origine dans la Recommandation OIT/UNESCO relative à la condition du personnel enseignant, adoptée le 5 octobre 1966, qui tient lieu de charte sur les droits des personnels enseignants à niveau mondial.

Cette année, l’appel à la mobilisation va bien au-delà de la compassion.

Il s’agit d’un appel en faveur d’actions audibles, visibles, concrètes et immédiates en réponse aux difficultés qu’affrontent les enseignant(e)s et les systèmes éducatifs de par le monde.

Un appel à la contestation et au renversement des mesures d’austérité adoptées par de nombreux gouvernements, en Europe et ailleurs, en réponse à la crise financière et économique.

Enfin, il s’agit d’un appel à la contestation contre la violation flagrante des droits humains, professionnels et sociaux des personnels enseignants dans les pays qui continuent de les fouler aux pieds.

Les partenaires du développement doivent tenir leur part de l’engagement en aidant les gouvernements nationaux à remplir leur responsabilité de garantir et de financer une éducation de qualité pour tous.

Pour ce faire, ils devront s’assurer qu’au moins 10% de l’Aide publique au développement octroyée aux pays en développement est affectée à l’éducation.

N’est-ce pas une intolérable injustice qu’à moins de trois ans de 2015, date butoir pour la réalisation de l’Éducation pour tous (EPT) et des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), 61 millions d’enfants d’âge scolaire primaire ne sont toujours pas scolarisés ?

Selon les prévisions de l’UIS, il faudrait plus de deux millions d’enseignant(e)s supplémentaires pour atteindre l’objectif de l’enseignement primaire universel, et bien davantage pour accomplir l’ensemble des six objectifs de l’EPT.

Plus de la moitié de ces enseignant(e)s (55%) devra être recrutée en Afrique subsaharienne.

 

Le défi

Le défi de la profession enseignante tient non seulement au nombre mais aussi à la qualité des personnels.

Beaucoup de pays continuent de recruter des enseignants non qualifiés ou sous-qualifiés, pratiquement dépourvus de qualifications professionnelles.

La déprofessionnalisation et l’informalisation de la profession enseignante – mises en évidence par le recours croissant aux contractuels, généralement moins bien rémunérés que les personnels enseignants salariés et ne bénéficiant souvent pas des mêmes prestations comme la sécurité sociale ou les prestations de retraite – pointent leur vilain nez aux quatre coins du globe.

La privatisation de l’enseignement public est un autre défi global qui menace de compromettre le progrès de l’EPT en marginalisant les personnes dépourvues des moyens financiers nécessaires pour accéder à l’enseignement privé.

La réaffectation de fonds normalement destinés aux établissements publics au profit d’initiatives privées comme les charter schools aux États-Unis et les academies au Royaume-Uni n’est pas une panacée au problème de la qualité et de l’équité de l’éducation.

La solution se trouve dans le renforcement de l’enseignement et des établissements publics.

L’enseignement public est plus équitable et durable et les pouvoirs publics devraient, dès lors, veiller à ce que les établissements scolaires soient dotés de personnels enseignants hautement qualifiés, compétents et en nombres suffisants.

Les gouvernements et les partenaires du développement doivent investir dans la formation des personnels enseignants, en mettant l’accent sur la qualité de cette formation, y compris la formation initiale et en cours d’emploi et le développement et le soutien continus.

Pour faire de l’enseignement une profession attractive et améliorer la rétention, les pouvoirs publics se doivent d’investir dans l’amélioration des conditions de service et des salaires pour le corps enseignant et l’ensemble des personnels du secteur.

Tout comme chaque enfant a le droit à une éducation, chaque élève mérite d’être éduqué par des enseignants qualifiés, adéquatement encadrés et motivés.

 

Dennis Sinyolo est le coordinateur de l’IE pour l’éducation et l’emploi