Le G20 doit monter aux créneaux pour désamorcer une crise mondiale

 

L’économie mondiale n’est guère plus stable aujourd’hui qu’elle ne l’était il y a six ans, cependant que les fléaux du chômage et de l’inégalité fomentent l’instabilité et le désespoir social.

En 2010, lorsque la croissance mondiale a atteint 5%, on a parlé des « premiers bourgeons » d’une reprise or avec le recul, il faut y voir le fruit d’une action concertée.

Pas plus tard que le mois dernier, le Fonds monétaire international a, une fois encore, revu à la baisse ses prévisions de croissance mondiale à seulement 3,1 pour cent. Aucune nation n’est une île dans l’économie globalisée d’aujourd’hui.

Nous nous trouvons, dans les meilleurs des cas, face à une période de stagnation prolongée.

Par ailleurs, l’échec croissant du multilatéralisme doit retentir comme un appel à l’action pour les dirigeants du G20. Du FMI à l’ONU, l’incapacité des institutions internationales à comprendre que la crise économique mondiale, causée par l’avarice et l’inégalité, réclamait une réponse sociale d’une urgence égale ou supérieure à celle du sauvetage du secteur financier a suscité une vague de méfiance à leur égard.

La situation mondiale est peu encourageante pour les travailleurs et leurs familles.

Le nombre de personnes sans emploi dépasse une fois de plus la barre des 200 millions, alors que le chômage des jeunes taraude toutes les nations sans exception. Dans les pays en crise et les nations en développement confrontées à un chômage endémique et des taux de chômage des jeunes de 30 à 60 pour cent, les tensions sociales affleurent.

Selon les estimations de l’Organisation internationale du travail, il sera nécessaire de créer 600 millions de nouveaux emplois au cours des 10 prochaines années.

Faute d’une approche mondiale concertée vers une reconstruction économique centrée sur des emplois et une protection sociale durables, nous nous trouvons en présence d’une bombe à retardement économique et sociale.

Le Sondage d’opinion mondial 2013 de la CSI nous livre un tableau pour le moins inquiétant.

Plus de la moitié des répondants ont signalé le déclin de leurs revenus au cours des deux dernières années à un niveau inférieur au coût de la vie.

Pratiquement deux personnes sur trois qualifient la conjoncture économique dans leur pays de mauvaise.

Les citoyens du monde se sentent abandonnés par leurs gouvernements car d’après eux, ceux-ci font passer les intérêts des entrepreneurs avant ceux des familles travailleuses alors que le chômage et l’inégalité vont croissant.

Quatre-vingt pour cent des répondants estiment que le gouvernement a manqué d’apporter une réponse efficace face au chômage dans leur pays. Seulement 13 pour cent des personnes sondées pensent que leur gouvernement se soucie des intérêts des travailleurs et de leurs familles.

Plus de la moitié des répondants estiment que la loi ne protège pas leur sécurité de l’emploi. Soixante-six pour cent estiment que la loi ne leur procure pas de protection en termes de salaires équitables.

Il est particulièrement préoccupant que seulement 13 pour cent des personnes interrogées pensent que leurs gouvernements agissent dans l’intérêt des citoyens.

Pire encore, près de 30% d’entre elles sont d’avis que leurs gouvernements agissent ni dans l’intérêt des citoyens, ni dans celui des entreprises.

Si l’on examine ces opinions au regard de celles recueillies dans le Sondage 2012 de la CSI, où 13 pour cent seulement des sondés estimaient avoir une quelconque influence sur les décisions économiques de leurs gouvernements et qu’on les associe avec le mécontentement social grandissant, il devient évident que le désaveu et, pire encore, le désengagement sapent la confiance en la démocratie.

La perte de confiance est alarmante et exige des réponses.
À l’approche du sommet qui se tiendra le mois prochain à Moscou, notre message au G20 est clair.

Nous avons besoin d’un plan d’action – nous avons besoin d’espoir. Cela requiert des emplois, encore des emplois et toujours des emplois ; des emplois, des salaires décents et une protection sociale.

Tragiquement, la demande d’emplois est restée lettre morte en termes d’une action coordonnée. Malgré la colère et la frustration que nous ressentons à l’égard des responsables de la crise et des politiques d’austérité tout aussi défaillantes, le fait est que nous devons reconstruire nos économies avec des emplois - une croissance tirée par les revenus, vers un avenir plus propre et plus vert - si nous tenons à assurer une économie mondiale inclusive et durable.

Le Sondage d’opinion mondial 2013 de la CSI nous montre que les citoyens du monde sont favorables à un plan d’action en cinq points contre l’insécurité et l’inégalité.

Ils veulent un plan d’action qui offre de l’espoir à travers l’emploi, des salaires équitables, des législations du travail fortes, un socle de protection sociale et des mesures obligeant les grandes entreprises à payer leurs taxes.

La grave crise de confiance à l’égard des institutions exige une action coordonnée. Mais face au leadership souvent chaotique et de plus en plus inefficace de l’ONU, le G20 est-il prêt à monter aux créneaux ?

L’année prochaine, l’Australie assumera la présidence du G20 et accueillera la conférence annuelle du groupe à Brisbane.

L’Australie est-elle prête à remettre sur la table l’action et la gouvernance concertées, pour favoriser l’emploi, un nouveau modèle d’investissement, la protection sociale, une réglementation financière, une justice climatique et des droits ou le G20 résultera-t-il simplement en une série de communiqués et une perte de confiance accrue.

La CSI poursuivra au sein du L(abour)20 et en collaboration avec l’ACTU son dialogue avec les gouvernements et les entreprises. Cependant, un réinvestissement des leaders eux-mêmes devra être le moteur de l’ambition et de la mise en œuvre pour soutenir l’espoir.

L’alternative est effrayante.

 


Ce texte est extrait du discours prononcé par Sharan Burrow au Lowy Institute for International Policy, à Sidney, le 1er août 2013, et publié sur le blog Working Life.