À la veille du 75e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, à qui s’appliquent encore ces droits ?

À la veille du 75e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme, à qui s'appliquent encore ces droits ?

Cette photographie du 3 août 2023 montre quelques-uns des 266 migrants secourus par les membres de l’ONG espagnole Proactiva Open Arms alors qu’ils tentaient de traverser la Méditerranée à bord de petites embarcations près des côtes libyennes. L’axe qui traverse la Méditerranée centrale est actuellement l’un des itinéraires de migration irrégulière les plus meurtriers au monde : selon le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, plus de 20.000 décès y ont été recensés depuis 2014.

(AFP/Matias Chiofalo)

Compte tenu de tous les coups d’État et feux de forêt qui se succèdent, de la crise du coût de la vie, de l’impact persistant de la crise de la COVID-19, de la crise généralisée des inégalités, des morts violentes et gratuites de personnes déplacées, des avertissements concernant les risques existentiels posés par l’intelligence artificielle, sans oublier la catastrophe imminente du dérèglement climatique et de la perte de biodiversité, nous vivons sans doute une époque plus qu’intéressante, voire trop intéressante.

Les conflits armés sont presque quatre fois plus nombreux aujourd’hui qu’en 2010, et tandis que des milliers de personnes périssent encore dans des hostilités depuis longtemps oubliées dans des endroits comme la République démocratique du Congo, le Yémen et la République centrafricaine, la possibilité d’une troisième guerre mondiale — du fait des tensions croissantes entre la Chine et les États-Unis et de l’actuelle guerre en Ukraine — reste terriblement présente dans les esprits.

Hors des traditionnels champs de bataille, les graves violations des droits humains se multiplient, de la Palestine à la province du Xinjiang. Selon le dernier Indice CSI des droits dans le monde, « les principaux indicateurs de violation des droits des travailleurs ont atteint des niveaux record », tandis que l’espace civique continue de se rétrécir et que le recul des droits des personnes LGBTQI+, des femmes et des populations minoritaires et racisées se poursuit à un rythme effréné. Aucune région n’est épargnée par cette tendance inquiétante, même si elle se manifeste de différentes façons. En Europe, elle se caractérise par le populisme d’extrême droite, le nationalisme et des frontières militarisées et meurtrières. Dans de nombreuses régions d’Afrique de l’Ouest et de l’Est, elle prend la forme d’insurrections terroristes et de coups d’État militaires et aux Amériques, la violence politique et l’agitation sociale sont un thème courant, tandis qu’au Moyen-Orient, la réhabilitation régionale de Bachar el-Assad et la montée en puissance de l’Arabie saoudite sur la scène internationale incarnent la chute des dernières feuilles flétries de l’espoir qui avait fleuri lors du « Printemps arabe ».

Pourtant, l’année 2023 est une année charnière pour les droits humains. Elle marque le 75e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, un engagement historique adopté après la Seconde Guerre mondiale par l’Assemblée générale des Nations unies en décembre 1948 envers les droits et libertés fondamentaux de la personne qui devraient être garantis pour tous, en tout lieu et en tout temps. Cet engagement a toujours constitué un idéal, mais il semble que nous nous trouvions à un moment où la liste des exceptions associées à cette déclaration et aux circonstances où elles s’appliquent s’allonge de jour en jour. Par conséquent, cette année marque un tournant : soit les dirigeants politiques reconduisent leur engagement en faveur des principes inscrits dans la déclaration, soit ils finiront par l’abandonner purement et simplement.

Néanmoins, si cette sélection d’articles récemment publiés par Equal Times recueille certains exemples alarmants de violations des droits humains — le démantèlement de la démocratie en Tunisie, les attaques contre les journalistes dans le pays où l’exercice de la profession est le plus dangereux (le Cameroun), le prix payé par les populations et l’environnement pour la construction de nouvelles capitales, l’utilisation de la surveillance de masse lors d’événements sportifs de grande ampleur et le nombre croissant de morts aux portes de la forteresse Europe —, chaque histoire met également en avant les personnes, les communautés et les institutions qui résistent et luttent pour améliorer la situation. Ces exemples nous montrent que, quelle que soit la gravité de la menace, chacun d’entre nous peut encore — et, très honnêtement, se doit d’essayer — d’apporter une contribution positive à notre vie et à celle des générations futures. Toutefois, toute action doit être étayée par la conscience que notre salut collectif est impossible sans reconnaître et s’engager envers le fait que tous les droits humains s’appliquent à tous les individus.

Comme nous le rappelait succinctement en début d’année Volker Türk, le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme : « La dignité et la valeur de chaque être humain ne devraient pas être et ne peuvent pas être un concept discutable et sensible ».

 

Au bord de la faillite, la Tunisie sombre dans un autocratisme populiste

Par Ricard González

Manifestation citoyenne contre le président tunisien Kaïs Saïed l’été dernier dans la capitale. Les pancartes soulignent que « le peuple est uni » et qu’il ne se laissera pas diviser.

Photo: Ricard González

Il y a trois ans à peine, la Tunisie était saluée comme la seule réussite des transitions nées du Printemps arabe. Pourtant, sous le couvert d’institutions démocratiques clinquantes, un malaise croissant couvait face aux promesses de prospérité formulées lors de la révolution de 2011 et qui n’ont pas été tenues. Lors des élections de 2019, Kaïs Saïed, un homme politique indépendant réputé pour son intégrité, remportait l’élection présidentielle grâce au soutien de plus de 70 % des électeurs. Même si certains avaient tiré la sonnette d’alarme sur son populisme à l’époque, personne ne s’attendait à une plongée aussi rapide et profonde dans une autocratie aux relents racistes.

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Nouvelles capitales, déforestation et apartheid social : parallèles entre le Brésil et l’Indonésie

Par World Rainforest Movement

Cette capture d’écran tirée d’une vidéo aérienne prise le 14 août 2022 montre Titik Nol Nusantara ("point zéro Nusantara"), la future capitale de l’Indonésie, à Sepaku, Penajam Paser Utara, Kalimantan oriental. Située dans l’est de Bornéo, Nusantara devrait remplacer Jakarta en tant que centre politique de l’Indonésie d’ici la fin de 2024.

Photo: Bagus Saragih/AFP

[…] Un parallèle frappant peut être établi entre ces deux histoires de nouvelles capitales : les deux projets ne font que renforcer un État colonial, même si leurs promoteurs prétendent le contraire. Les deux projets dominent et détruisent les espaces de vie et les territoires des communautés forestières pour des intérêts économiques et politiques. Et les deux nouvelles capitales favorisent également des politiques d’apartheid social.

Cependant, les deux histoires montrent également le rôle des luttes sociales comme moyen de mettre un terme et d’effacer une histoire coloniale et d’autres oppressions structurelles, parmi lesquelles le racisme, le capitalisme et le patriarcat.

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Au nom de la sécurité des JO de Paris, la France veut surveiller la foule en s’appuyant sur l’IA et les algorithmes

Par Clément Gibon

Les caméras de la marque VIGI360 permettent de couvrir une zone à 360° tout en enregistrant en boucle les images sur une durée de 72 heures. Ce système permet également d’intégrer les nouveaux dispositifs de vidéo intelligente.

Photo: Clément Gibon

De l’installation de 15.000 caméras biométriques à Doha pour surveiller les comportements des supporters de la Coupe du monde 2022, à l’introduction en avril dernier de caméras dans les lieux publics pour identifier et sanctionner les femmes non-voilées en Iran, ou encore l’utilisation de la reconnaissance faciale par Israël pour contrôler les Palestiniens d’Hébron et de Jérusalem-Est, les technologies de surveillance de masse sont utilisées par les États pour appuyer toujours plus les forces de l’ordre à des fins sécuritaires.

C’est également le cas dans des pays considérés jusque-là comme plus respectueux des libertés publiques. Ainsi, la France a ouvert la porte à l’expérimentation d’une nouvelle technologie controversée, en mars 2023, en votant un article du projet de loi relatif aux Jeux olympiques et Paralympiques (JOP) de 2024. Cet article autorise l’expérimentation de la vidéosurveillance algorithmique ou automatisée (VSA) à tous les événements sportifs, récréatifs et culturels dépassant les 300 participants jusqu’au 31 mars 2025. La loi a été promulguée le 19 mai et l’expérimentation peut ainsi commencer.

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Les travailleurs des médias camerounais confrontés à une répression de plus en plus violente

Par Amindeh Blaise Atabong

L’équipe de la rédaction du principal quotidien du Cameroun en langue anglaise, The Guardian Post, travaillant sur le tirage du lendemain au siège du journal, à Yaoundé, le 30 mars 2023. The Guardian Post a subi au moins deux suspensions de deux mois chacune, imposées par le Conseil national de la communication, dont les membres sont tous nommés par le président Paul Biya.

Photo: Amindeh Blaise Atabong

[…]La liberté des médias et la sécurité des journalistes est en déclin au Cameroun depuis une décennie : du fait de la lutte que le gouvernement livre aux rebelles islamistes de Boko Haram au nord du pays, et à cause du conflit prolongé entre les forces gouvernementales francophones majoritaires et les séparatistes anglophones au sud-ouest et au nord-ouest, les journalistes se retrouvent entre plusieurs fronts.

Reporters sans frontières classe le Cameroun parmi les pays dont le paysage médiatique est l’un des plus dangereux du continent africain, en proie à l’hostilité et à la précarité ; en parallèle, le Comité pour la protection des journalistes (Committee to Protect Journalists, CPJ) a révélé que ce pays d’Afrique centrale, gouverné depuis 1982 par le président nonagénaire Paul Biya, était l’un des pays d’Afrique qui comptait le plus de journalistes en prison.

Les travailleurs des médias sont régulièrement attaqués, menacés, censurés et incarcérés pour divers motifs – opposition à l’État, délit de diffamation, informations fausses – quand ils ne font pas l’objet de représailles, comme le révèle le CPJ. Plusieurs journalistes ont été contraints à l’exil.

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L’échec du système d’immigration légale de l’Europe à l’origine de ses crises frontalières

Par Farhad Mirza

Cette photo prise le 9 mars 2023 montre une croix en bambou ornée d’un rosaire, érigée en guise de mémorial sur une plage proche de la localité de Cutro. En arrière-plan apparaît la mer Méditerranée, où au moins 72 migrants ont trouvé la mort le 26 février, après que leur embarcation a fait naufrage au large de la Calabre, dans le sud de l’Italie.

Photo: AFP/Tiziana Fabi

[...] L’Europe demande aux migrants de respecter ses frontières, de respecter ses lois, or elle bafoue ses propres lois lorsqu’il s’agit de contrôler ses frontières. Les refoulements illégaux et violents de migrants sont devenus une pratique institutionnelle courante dans l’Union européenne, privant les migrants des droits consacrés par la législation européenne.

Entre-temps, le bilan humain de ces politiques est effroyable : plus de 27.000 personnes noyées en mer Méditerranée depuis 2014. Des accords douteux passés avec des « pays de transit sûrs » pour étouffer dans l’œuf les mouvements irréguliers ont donné lieu à l’émergence de marchés d’esclaves migrants en Libye. La politique de refoulement sommaire a conduit à des massacres tels que celui survenu à Melilla en juin 2022, lorsqu’un groupe de demandeurs d’asile africains qui tentaient de passer du Maroc à l’enclave espagnole ont été la cible de violences meurtrières de la part des forces de sécurité, qui ont fait entre 23 et 37 morts. Personne n’a jamais été amené à rendre compte de ces décès.

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Cet article a été traduit de l'anglais.