COP20 Lima : leurre ou lueur d’espoir ?

Actualité

Alors que le Pérou accueille la Conférence des Parties (COP20), le grand rendez-vous environnemental mondial, du 1 au 12 décembre, son action sur le sujet ces derniers mois laisse songeur

Qu’il semble loin le temps où le gouvernement péruvien appelait à la mobilisation citoyenne contre le changement climatique…

Lancée en mars, l’opération Pon de tu parte (Mets-y du tien), menée par le ministère de l’Environnement et plusieurs organisations de la société civile visait alors à mobiliser citoyens, entreprises et institutions pour la défense de l’environnement.

Une première étape pouvait-on alors imaginer dans la préparation de la COP20, le sommet environnemental mondial lancé dans le prolongement du protocole de Kyoto.

Trois mois plus tard, pourtant, était votée la loi n°30230, mieux connue sous le terme de Paquetazo Ambiental.

Battue en brèche par les organisations écologiques et indigènes, cette loi avait pour objectif premier de relancer l’économie.

« La réduction des barrières bureaucratiques, mais aussi la baisse des surcoûts et de la main-d’œuvre vont permettre d’améliorer le climat des affaires » expliquait ainsi Cesar Penaranda, le directeur de l’Institut de l’économie et du développement des entreprises de la Chambre de commerce de Lima, interrogé par la correspondante du Monde à Lima.

Si l’impact économique que le gouvernement estimait alors à une augmentation de 1 à 1,5% du PIB ne peut pas encore être évalué, l’impact moral est lui évident. Une impression renforcée par plusieurs décisions prises les mois suivants.

La Société péruvienne de droit environnemental (SPDA) a ainsi effectué une liste de dix décisions prises depuis mai dernier destinés à affaiblir la lutte pour l’environnement au Pérou.

Jimmy Carillo, le responsable de la cellule de communication de la SPDA voit dans le paquetazo un «  signal de nervosité face à des investisseurs qui ont peur qu’une crise économique internationale affecte le Pérou et qui pensent que les mesures de protection de l’environnement pourrait limiter la compétitivité du pays ».

Si le président Ollanta Humala a défendu le fait que le paquetazo n’abaissait pas les standards environnementaux du pays, l’opposition n’hésite pas à souligner les « incohérences ». » L’absence du président péruvien à la cérémonie d’inauguration n’arrangeant rien.

Interrogé par Equal Times, Pedro Francke, le coordinateur national de « Frente Amplio », un regroupement de partis de gauche explique : « Le gouvernement péruvien se sert de la COP20 pour essayer d’avoir un rôle de leader environnemental sur le plan mondial. Mais au niveau local, les choses sont de pire en pire ! C’est une attitude très hypocrite ».

Parmi les mesures polémiques on trouve l’impossibilité pour l’Organismo de Evaluacion y Fiscalizacion Ambiental (l’Organisme d’évaluation et de fiscalisation environnemental - OEFA) d’infliger des amendes pour les trois prochaines années sauf cas exceptionnel.

Le tout jeune ministère de l’Environnement (MINAM), créé en 2008, n’est plus en charge des zones protégées, ou encore des standards de qualités environnementaux, devenues des compétences du Conseil des Ministres.

Autant de mesures qui devraient être prochainement attaquées pour inconstitutionnalité. C’est ce que souhaite Henry Carhuatocto Sandoval, président de l’Instituto de Defensal Legal del Ambiente y del Desarollo Sostenible (Institut de défense légal de l’environnement et du développement durable - IDLADS).

Lors d’une conférence organisée à Lima en novembre, il expliquait ainsi que « six éléments du texte de loi ne sont pas compatibles avec la Constitution péruvienne ».

Parmi celles-ci, les études d’impact environnementales. Etapes indispensable pour chaque projet d’exploration ou d’exploitation, elles pouvaient durer plusieurs mois. Elles sont maintenant limitées à 45 jours, délai au-delà duquel l’autorité compétente pourra être sanctionnée.

Pour la Confederacion General de Trabajadores de Peru (Confédération Générale des Travailleurs du Pérou – CGTP), le Pérou n’a pas la légitimité pour organiser la COP20.

Contactée par Equal Times, Ibis Fernandez, la responsable des sujets écologiques au sein de la structure précise : « On est dans le show avec la COP20. Le gouvernement tient des grands discours mais fait le contraire au niveau législatif. Pire, les activistes environnementaux et leaders indigènes sont persécutés ou tués comme Edwin Chota, sans qu’il ne réagisse… L’organisation de cet évènement par le Pérou est un leurre ! »

Pour Jimmy Carillo, la COP20 peut toutefois représenter une lueur d’espoir pour le pays. « On a beaucoup parlé cette année du changement climatique au Pérou. Je pense que la COP va avoir des conséquences positives. Les citoyens et l’impact médiatique de l’évènement peuvent faire changer les choses… »